@gilles27, c'est un jugement à l'emporte-pièce, et comme je n'ai jamais discuté de tout ça avec l'intéressé, et que je ne connais pas les détails derrière les faits, c'est sans doute très caricatural, donc à ne pas prendre au pied de la lettre.
Ce préambule étant fait, si on regarde bien, au début de sa carrière moto il n'a eu aucun choix à faire :
1963, il roule très bien en Italie, décroche le titre 175cc sur une Morini, le Comte Morini vient de perdre son meilleur pilote parti à la concurrence et lui propose de faire la saison 1964 en 250cc sur une Morini usine : pas vraiment de choix à faire, ça ne se refuse pas !
Un an plus tard, c'est le Comte Agusta qui lui propose de monter en 350 et 500cc sur les mythiques MV pour la saison 1965, là encore, pas vraiment le genre de proposition qu'on peut refuser à l'époque, d'autant qu'il n'en a aucune autre avec laquelle hésiter, sauf erreur de ma part.
Un an après, Hailwood quitte MV et le Comte Agusta propose à Ago d'être unique pilote d'usine MV ; ce sera le cas jusqu'en 1972, et Ago n'a pas vraiment de choix à faire, puisqu'il n'y a pas d'autre usine réellement impliquée en GP pendant cette période, et qu'en restant la, sans concurrent, même pas un coéquipier, il amasse victoires, records, titres et ... confortables primes.
Il faudra en réalité attendre fin 72 pour qu'Agostini ait un réel choix de carrière à faire : Yamaha prépare son retour officiel pour 1973 et fait une proposition à Ago. MV lui propose également de rester, avec Read qui est confirmé en 350 et en 500.
Sans doute Ago ne croit-il pas vraiment aux chances des 2-temps en 500, en tout cas il rejette l'offre de Yamaha, donc les pilotes officiels Yamaha seront Saarinen et Kanaya, et dès le premier GP de 1973, au Castellet, il est clair qu'Ago s'est trompé, les Yamaha sont déjà supérieures aux MV-3, Ago finit par chuter tellement il force pour essayer de suivre Saarinen, pendant que Read bataille contre Kanaya.
MV Agusta réagit et précipite la sortie de la nouvelle 4 cylindres sur laquelle le Reparto Corse travaillait déjà ; Read l'accepte tout de suite et se concentre sur sa mise au point, mais Ago préfère continuer avec sa vieille 3-pattes. A nouveau il se trompe, et pendant qu'il tergiverse entre les deux motos, Read brille contre les Yamaha en début de saison, gagne son premier GP500 pour MV à Hockenheim suite à la rupture de la chaine secondaire de la Yamaha de Saarinen, et gagnera le titre ensuite sans coup férir, Ago ne se consolant pas vraiment avec le titre 350, qu'il ne décroche qu'avec l'aide de Read, qui sort Länsivuori de la piste au GP de Finlande.
Quand Yamaha propose à nouveau à Ago de rejoindre l'équipe officielle pour la saison 1974, il n'y a plus d'hésitation à avoir : Ago sait que les MV sont désormais dépassées, et il n'est plus en odeur de sainteté chez MV, où on ne jure plus que par Read et sa ténacité. Ago gagne le titre 350 à nouveau en 1974, puis enfin le titre 500 en 1975.
Fin 1975, Yamaha annonce le retrait de son équipe officielle pour la saison 1976.
Les motos d'usine de 1975 sont à sa disposition s'il le souhaite, mais Ago fait un autre choix : Il crée sa propre équipe pour la saison 1976, récupère les MV 350 et 500 de 1975 et le matériel et les mécanos de la désormais défunte usine MV Agusta, mais comme il n'est pas sur qu'elle soient encore au niveau il achète aussi une Yamaha 350 TZC, et une Suzuki RG500 MkI (et je ne parle pas de la Morbidelli 250 ni de la Yamaha YZR750 0W31 qu'il pilotera aussi cette année-là)
C'est Cecotto qui hérite le matériel Yamaha usine 1975.
Résultat, comme en 1973 il passe son temps à hésiter entre toutes ses motos, et finalement, pour la première fois depuis 1965, il ne gagne aucun titre mondial. Heureusement, pour l'histoire, il remporte les deux derniers GP de la marque MV Agusta, en 350 à Assen et en 500 au Nürburgring.
En 1977 Yamaha revient, et lui propose des motos d'usine mais pas de place dans l'équipe officielle ; il n'a aucune autre offre, donc soit il accepte, soit il raccroche. Il décide d'accepter.
Cette fois il semble qu'Agostini soit un peu las, il est nettement dépassé par les jeunes, lui qui a désormais 35 ans, cette saison est sans doute la saison de trop pour son image, et il raccroche en fin de saison, non sans avoir remporté une dernière victoire, en 750, face à bien peu d'adversité.
C'est la réflexion que je me faisais et qui t'a fait réagir.
Je pense qu'Ago est surtout quelqu'un qui a du mal à faire des choix, et de surcroît il ne me semble pas que les choix qu'il a faits, en 72, en 73, en 75, en 77, aient été bons.
Sa carrière auto a été très malheureuse (mais j'espère au moins que lui s'est fait plaisir au volant) et ensuite comme team manager il n'a pas fait d'étincelles non plus, assez rapidement éclipsé par Kenny Roberts.
Et on se souvient ici de son hésitation concernant le second pilote de son équipe fin 82, quand il a d'abord contacté et fait rouler notre Tournadre, avant de faire machine arrière pour engager Lawson.
Je ne sais pas comment cette valse-hésitation s'est déroulée dans les coulisses, mais en apparence on retrouve cette indécision.
Je précise que je ne remets pas en cause l'immense talent de pilote d'Ago, et je regrette souvent pour lui que les saisons 1968-1972 aient été aussi dénuées d'opposition, parce qu'elles jetteront toujours un doute sur les 10 titres et plus ou moins 100 victoires qu'il a acquis pendant ces 5 saisons. Mais ça ce n'est pas sa faute, et c'est une réflexion de fan de GP, parce que ses saisons d'invincibilité lui ont apporté, d'un autre côté, une célébrité inouïe auprès du grand public, que ses 15 titres et 122 victoires en GP continuent d'impressionner.
Et bien entendu ce genre d'analyse est facile à faire à posteriori, beaucoup moins quand on est dans le feu de l'action et qu'on ne peut se baser que sur des hypothèses.
Voili voilou