Comme d'habitude, il s'agit d'un brouillon: toute correction ou complément seront les bienvenus! Merci! J'aimerais surtout des précisions sur les moteurs de cross, que je ne connais pas du tout...Après de multiples rumeurs, la décision a donc été prise à l’unanimité le 14 août 2010, lors du week-end du GP de Brno par la commission des Grands Prix : dès 2012, la Moto3 remplacera les actuelles 125cc 2temps.
La Moto3, la fin d’une époque !M. Carmelo Ezpeleta (Dorna, CEO) :
“Nous avons aussi décidé que la catégorie 125cc serait remplacée par le Moto3 en 2012, ce qui a été approuvé en principe par tous les membres. La MSMA a majoritairement approuvé et le reste des membres : la FIM, l’IRTA et Dorna ont tous approuvé.
L’idée de base est une 250cc, 4 Temps, monocylindre avec un alésage maximum de 81 mm.L’objectif est de créer une catégorie plus compétitive et moins coûteuse. Notre idée est de créer une catégorie avec plusieurs moteurs et non un moteur unique. Beaucoup de choses restent à discuter mais cela concerne la saison 2012.”Ainsi, la dernière catégorie qui représentait l’image même de Grand Prix, telle qu’on la connaissait depuis les années 60’ va disparaître, laissant les circuits dénués de fumées bleues et de bruits de crécelles.
Certains le regretteront, bien sûr, comme ils ont regretté les abandons successifs des 50cc, 80cc, 250cc, 350cc, 500cc et 750cc, déplorant la cessation d’une certaine recherche technologique, il faut le reconnaître, nous a apporté les distributeurs rotatifs, les clapets, les valves à l’échappement et autres pots de détentes, mais il semble plus pragmatique de regarder en avant pour essayer de comprendre ce qui nous attend.
Quelle est la motivation ?La démarche de la Dorna est assez claire : contrainte de réagir globalement face à la pauvreté du plateau MotoGP et au très onéreux quasi-monopole d’Aprilia en 250cc et 125cc durant ces dernières années, elle a, dans un premier temps, créé la catégorie Moto2 dont le succès démontre une approche assez pertinente dans le contexte économique morose actuel.
Fort de cette première victoire (on refuse des places en Moto2 et les courses y sont souvent aussi disputées que durant les années glorieuses de la 250cc, les « 80’ »), elle entend bien décliner la formule dans les deux autres catégories des Grands Prix qu’elle gère, au nom de la limitation du coût des motos, et plus particulièrement de leurs moteurs.
En arrière plan, évidemment, une volonté de stabiliser ou d’accroître son audience, principal facteur influant sur son chiffre d’affaire.
Techniquement, la Moto3, qu’est-ce que c’est ?Il semblerait que l’on ait longtemps hésité sur la cylindrée et le nombre de cylindres mais des motos de 450cc bicylindres, comme celles de la catégorie BeON en Espagne, sans doute plus fiables, auraient été à la fois trop proches de la catégorie Moto2 au niveau des performances et probablement trop lourdes pour des motos amenées à être pilotées par de touts jeunes garçons (la limite minimale d’âge en GP est actuellement fixée à 16 ans).
Nous voilà donc promis à des 250cc 4 temps monocylindre.
L’équivalence théorique de performances 250cc 4temps / 125cc 2temps n’est pas nouvelle puisqu’elle est toujours d’actualité aussi bien dans notre championnat national (où le team TVX avait fait quelques essais, sans grands succès, en 2009) qu’en championnat du monde où, là, aucun concurrent ne s’est manifesté pour exploiter cette possibilité.
Il y a une bonne raison à cela ; aujourd’hui, si quasiment tous les constructeurs disposent d’une telle mécanique (un des facteurs pris en compte pour décider de ce choix), il s’agit unanimement de motos destinées au Tout-Terrain, avec les spécificités que cela impose, surtout en ce qui concerne l’étagement de la boîte de vitesse…
Certainement pas un hasard, la catégorie existe aussi à part entière au Japon depuis quatre ans (et, fait moins connu, en Indonésie également) sous l’appellation GP One.
Tournons donc nos yeux vers l’Empire du Soleil Levant pour voir quels sont les acteurs de la catégorie et comment ils ont adapté ce concept à la piste…
La Moto3, aujourd’hui, c’est qui ?Avant tout, un moteur Honda !
Si plusieurs motorisations sont disponibles, la firme japonaise semble avoir actuellement une petite avance sur la piste.
La puissance délivrée est estimée entre 46 chevaux pour un moteur CRF entièrement préparé (Injection, piston, AAC, etc) et 53 chevaux pour un moteur prototype produit par le HRC.
A noter que les KTM et les Yamaha de série sont encore alimentées par un carburateur, contrairement aux Honda et Suzuki.
Toutefois, on retrouve des carburateurs sur certaines Honda Moto3…
Au niveau châssis, le championnat est mené par la Harc Pro HP250RF du japonais Komuro.
Inconnu en Europe malgré une victoire aux dernières 8 heures de Suzuka, ce petit constructeur initialement spécialiste des Honda NSR propose une partie-cycle pour 367,500 Yens (juste le cadre, le bras oscillant et le réservoir).
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]Comme la moto de Komuro est soutenue directement par Honda, on peut supposer que ses performances proviennent essentiellement de son moteur (et de sa très grosse boîte à air)…
D’ailleurs, la seconde moto, sans soutient du géant japonais, n’apparaît qu’en 7ème place du classement.
On retrouve ensuite l’incontournable Moriwaki dont les liens avec le géant japonais sont également plus qu’excellents et qui propose depuis plusieurs années une Moto3 MD250H basée sur un moteur Honda modifié et une copie du cadre de la 125 RS Honda NX4 (ou MD250S avec le moteur Suzuki).
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien]Plusieurs Moriwaki ont déjà été importées en Europe, principalement en Espagne et en France et le modèle a pu être essayé par un professionnel reconnu du 125cc 2temps.
Son avis n’est pas négatif, loin s’en faut, mais révèle déjà une limite de la formule : « La partie cycle est amusante. Une vraie petite moto de course. Malheureusement, la boîte n’est pas adaptée à la piste, surtout à cause de la première, trop courte.
On retrouve également encore l’axe du kick, ce qui montre que le concept est loin d’être poussé au maximum ».
D’une façon générale, concernant les Moto3 de GP, il va donc falloir, dans un premier temps, envisager de faire fabriquer au moins des jeux de pignons, ce qui n’est pas vraiment excellent pour limiter les coûts.
Un troisième prétendant, et non des moindres, présente sa propre solution déclinée à la fois pour le moteur KTM et le moteur Honda. Il s’agit du « petit » constructeur TSR, déjà présent en Moto2 en fournissant la moto de l’infortuné Pasini sous l’appellation commerciale Motobi.
Face à Harc Pro, Moriwaki et autre TSR, on trouve pour le moment un autre constructeur japonais, moins connu, mais dont les réalisations utilisent toutes les techniques de pointe afin d’obtenir un produit fini de très grande qualité ; Over Racing.
Disponible sous forme d’un kit partie-cycle, la OV-31 est conçue pour utiliser le propulseur Yamaha à cinq soupapes.
Une de ces motos est actuellement en France, chez MG Compétition, près de Genève, où Martial Garcia est prêt à étudier une éventuelle collaboration afin de monter un programme de tests en 2011.
Moteur Yamaha ou Honda ? Rien n’est encore décidé mais le programme pourrait englober une participation à un championnat national en 2011 pour être au niveau GP en 2012 : avis aux partenaires et aux teams intéressés !
En fait tous les préparateurs japonais travaillent sur le sujet depuis pas mal de temps, que ce soit au niveau des châssis...
... qu'au niveau des moteurs (ici un Husqvarna)!
On trouve également des solutions plus exotiques comme un moteur KTM dans un cadre Honda; si on note que l’échappement est intégré à la selle, ce qui est esthétiquement bien plus satisfaisant, on peut se poser des questions sur l'adaptation moteur-cadre...
Autre possibilité assez prisée au Japon, le « bitza » à moteur Honda et cadre Honda 125 RS.
La démarche, qui peut sembler logique, n’est pas très onéreuse et est à la portée de petits teams.
Le montage d'un moteur Yamaha demande plus de travail sur le cadre...
Plus près de nous, en Italie, on peut noter l’utilisation d’un châssis Aprilia doté d’un moteur Suzuki.
Enfin, encore plus près de nous, on parle d’une Moto3 bretonne de fort belle facture, création du célèbre Eric Toullec (la 250 Fulgur tout en carbone, vous vous souvenez ? Didier Langoüet, actuellement chez Suter, faisait alors partie du projet...).
Comparaison moteurs actuels : Marque | Alésage x course | Puissance stock | Puissance avec Akrapovic | Boîte à cassette |
Yamaha | 77.0 x 53.6 | 33.6 / 11900 | 34.8 / 12000 | Non |
Suzuki | 77.0 x 53.6 | 34.5 / 11500 | 34.6 / 11300 | Non |
Kawasaki | 77.0 x 53.6 | 33.7 / 11050 | 34.1 / 11050 | Non |
Honda | 76.8 x 53.8 | 36.0 / 11350 | 36.6 / 11300 | Non |
TM | 77.0 x 53.6 | | | Non |
Husqvarna | 76.0 x 55.0 | 32.3 / 11100 | 34 / 12000 | Non |
KTM | 76.0 x 54.8 | | | |
Quelque soit le constructeur, on voit que, pour le moment, la limite des 81 mm d’alésage n’est pas atteinte, loin s’en faut, et que l’utilisation de moteurs dérivés du tout-terrain n’offre pas une optimisation du concept : Alésage, boîte à cassette et encombrement apparaissent donc comme les pistes principales pour qui voudrait proposer un vrai moteur de compétition..
Un constructeur va-t-il relever le défi et proposer une mécanique fiable sur 3 GP à 10 000 euros, avec la contrainte d’éventuellement équiper 15 motos, comme cela sera imposé par la réglementation ?
Incontestablement, oui !
Sans même parler des 3 japonais impliqués en MotoGP, on parle déjà de 3 autres constructeurs fortement intéressés par le projet, au moins pour adapter un moteur actuellement disponible dans leur gamme.
Mais un constructeur va-t-il prendre le risque financier de réellement créer un tout nouveau bloc, allégé, compact, et disposant d’une boîte à cassette, pour répondre aux besoins spécifiques de la Moto3 ?
Une fois cette question posée, on pense tout de suite à Honda, le « bon ami » de la Dorna, toujours prêt à rendre service, et le seul fabricant ayant actuellement la capacité financière de développer une petite série de moteurs très sophistiqués vendus moins de 10 000 euros.
Et pour encore renforcer cette hypothèse, si cela était nécessaire, Honda a bien déposé un brevet (en 2007 au Japon mais seulement en 2009 à l’international) concernant une éventuelle Moto3, à cylindre incliné en arrière et culasse inversée afin de rendre l’ensemble plus compact :
Quel serait alors l’intérêt de Honda ?Renforcer son hégémonie sur le monde des grands Prix ? Certes, cela ne leur déplairait pas, après avoir subi pendant des années les plateaux 125 et 250 trustés par les Européens.
Gagner de l’argent ? A l’heure où KTM et Husqvarna ont fait machine arrière, aux USA, et sont repassés du 4temps au 2temps, bien moins onéreux à entretenir, cela semble à priori impossible !
(On estime déjà à 8000 euros la simple préparation du haut moteur; culasse, alimentation, AAC, piston)
Sauf si Honda tente un tour de passe-passe pour fournir des kits « de base » à 10 000 euros à la majorité du plateau, fiables, assez peu performants, et répondant au règlement, mais aussi, directement ou par l’intermédiaire de sociétés proches, quelques kits « usine » bien plus onéreux à certains teams de pointe…
Cette éventualité met le doigt sur un véritable casse-tête annoncé pour la Dorna : comment gérer les différents fournisseurs de moteurs, tout en respectant le règlement dans la lettre mais aussi dans l’esprit, sans une entité unique et impartiale ?
Une telle structure aurait un coût, ce qui se répercutera probablement sur les primes de départ de la catégorie…
Autre question : les moteurs seront-ils scellés entre les courses et que se passera-t-il en cas d’évolution ultérieure d’un des propulseurs ?
Un constructeur peut très bien aligner des kits de base pour les trois premières courses puis proposer « quelque chose de mieux » pour les suivantes.
Bref, en absence de « claiming rule », la porte est ouverte pour tous les contournements…
Alors, succès immanquablement annoncé pour la Moto3 ?Outre les problèmes déjà évoqués, un doute subsiste…
Qu’adviendra-t-il si plusieurs constructeurs fournissent des moteurs et que l’un d’entre eux domine outrageusement le championnat ? Ne pouvant imaginer, par la nature même du règlement, une guerre à l’armement apte à rétablir une différence de niveau, on devrait se résoudre à voir une palanquée de jeunes pilotes incapables de lutter pour la victoire, suivant le choix de tel ou tel constructeur fait par leur team en début d’année.
A la limite, comble du spectateur, on en viendrait presque à regretter le moteur unique de la Moto2 !
Au niveau partie-cycle, nous ne nous faisons aucune illusion : aucune de procurera à ses pilotes un réel avantage durable, puisque jusqu’à aujourd’hui, elles sont toutes basées sur le même compromis traditionnel fourche télescopique-bras oscillant.
On le voit bien en Moto2 où malgré la douzaine de constructeurs de parties-cycles, on trouve parfois plus de vingt concurrents dans la même seconde !
A moins que quelques techniciens hors-pairs ne se lancent dans l’aventure avec de nouvelles approches destinées à contrer les micro-accélérations néfastes des roues avants et arrières; vous avez dit « Eric Offenstadt » ?
Enfin, dernière petite réserve : le bruit d’un mono 4temps de petite cylindrée n’aura certainement pas de quoi nous ravir, surtout étouffé par un volumineux et très laid silencieux…