[GP] La montée en puissance de la Malaisie

L'intérêt de la Malaisie pour la moto de compétition de vitesse n'est pas récent et il suffit pour s'en convaincre de se rappeler les expériences Modenas (constructeur de motos malaisien produisant des Kawasaki sous licence) en 1997-2000, puis Proton (constructeur automobile malaisien propriétaire de Lotus depuis 1998) dans les années 2001-2004 avec le Team Kenny Roberts.
Après avoir débuté avec un trois cylindres deux-temps 500 cc pendant la période Modenas (KR3), le triple Champion du Monde avait ensuite signé un partenariat avec Lotus Engineering (!) pour la fourniture du V5 quatre-temps 1000cc de la Proton (KR5).
Malgré les présences de Jean-Michel Bayle et Kenny Roberts Jr (KR3), puis Jeremy McWilliams et Nobuatsu Aoki (KR5), ces aventures n'ont jamais réellement concrétisé les espoirs placés en elles.


C'est également à cette époque que l'on construit le spectaculaire circuit de Sepang avec un premier Grand Prix moto en avril 1999.



Au début des années 2000, Petronas, le plus grand pétrolier malaisien, finance une MotoGP étudiée par le team suisse de F1 Sauber.
Elle est présentée à Sepang en avril 2001.


Elle est dotée d'un trois cylindres en ligne dont la particularité est d'être incliné vers l'arrière, l'injection se situant vers l'avant.


Malgré l'arrivée d'Eskil Suter en 2002, la moto ne sera jamais alignée en MotoGP mais en Superbike avec Carl Fogarty.
Pour cela, on fabriquera une série de 150 motos civilisées, pour moitié par MSX International, entreprise de l'Essex, le reste étant assemblé chez Modenas en Malaisie.
Malgré quatre saisons de Superbike, elle n'obtiendra que très peu de résultats satisfaisants.


Petronas change alors son fusil d'épaule et sponsorise le très officiel team Yamaha Factory Racing avant d'être remplacé par le pétrolier japonais Eneos en 2012 rejoint par SuisseGas en 2013.

Ces expériences malheureuses ne lassent pas les Malaisiens, poussés par une dizaine de millions de deux-roues en circulation dans le pays mais, à l'inverse des Chinois, les amènent à planifier une croissance basée sur des pilotes malaisiens.

En 2009, Air Asia crée le Team Air Asia Team Malaysia et commence modestement en alignant Muhammad Zulfahmi sur une Yamaha 125 parallèlement à Elly Ilias sur une Aprilia.
En 2010, ces deux pilotes malaisiens sont remplacés par leur compatriote Zulfahmi Khairuddin dans le team Ongetta Team79 AirAsia Sepang International Circuit.


L'année dernière, Zulfahmi Khairuddin en Moto3 (AirAsia-Sic-Ajo) et Hafizh Syahrin en Moto2 (Petronas Raceline Malaysia) se sont brillamment illustrés et si, cette année, Azlan Shah (Idemitsu Honda Team Asia) fait plus pâle figure, il n'en reste pas moins vrai que la relève est d'ors et déjà programmée avec, à côté du classique championnat asiatique (Asia Road Racing Championship, ARRC) qui s'arrête déjà dans le pays, la mise place en 2014 d'une vraie filière basée à Sepang sous la direction d'Alberto Puig pour le compte de la Dorna; la Shell Advance Asian Talent Cup ( [Vous devez être inscrit et connecté pour voir ce lien] ).
Les partenaires de cette série de six courses, qui fera courir  22 pilotes âgés de 14 à 20 ans en marge des GP ou du Superbike, sont Shell, Honda, le circuit de Sepang, Red Bull, Bridgestone et... Air Asia.
Soit une vraie petite "Red Bull MotoGP Rookies Cup" à la sauce malaisienne!



Mais Air Asia et son Tony Fernandes de président, n'entendent pas s'arrêter en si bon chemin...
Etant également propriétaire de l'écurie de F1 Caterham depuis 2011 (anciennement appelée Team Lotus), il a bien compris que l'on n'était jamais si bien servi que par soi-même et a donc décidé d'aligner un team en Moto2 en 2014.


Techniquement, Caterham a décidé d'acheter des châssis pour la première année.
Après s'être vu opposé un refus catégorie par Kalex qui a bien compris qu'il ne s'agirait pas d'un client fidèle, le team malaisien basé près d'Oxford dans les anciennes installations d'Arrows et de Super Aguri s'est donc rabattu sur des Suter.
Du moins pour la première saison car il est évident que, même si l'équipe est loin d'avoir les ressources humaines de Ferrari ou Mc Laren, il ne faudra pas bien longtemps aux hommes en vert et jaune pour créer leur propre châssis...


Côté pilotes, on sait que Caterham voulait s'attacher les services du Suisse Dominique Aegerter, un pilote maintenant expérimenté en Moto2.
Pour cela, une proposition financière très alléchante lui a été faite.
Les discussions ne sont pas complètement terminées mais on peut penser que le manque d'expérience total de l'équipe malaisienne en moto est un handicap majeur pour celui qui vise la lutte pour le titre en 2014, même si, sans nul doute, la puissance financière de Caterham en fera un interlocuteur privilégié auprès de Suter...
Concernant le second pilote, la simple logique (timing et nationnalité) inciterait à penser au Malaisien Zulfahmi Khairuddin.

Enfin, on peut se demander quels seront les liens à venir entre Caterham et le team britannique PBM car tout semble indiquer une convergence d'intérêts, et pas seulement les couleurs des motos...

Quoi qu'il en soit, voilà une expérience qui sera bien intéressante à observer car, jusqu'à présent, l'incursion du monde automobile dans celui de la moto n'a jamais donné de résultats très probants et même BMW, toute puissante soit-elle, s'y use actuellement un peu les dents...

Comme d'habitude, toute précision, correction ou compléments seront les bienvenus...

 

Marc a écrit:

Comme d'habitude, toute précision, correction ou compléments seront les bienvenus...

 

Comme d'hab', Marc, remarquable !

Juste une précision : au début (1997-2000), KR était soutenu par Modenas et n'a basculé sur Proton qu'à partir de 2001.

Depuis l'Europe, on peut facilement confondre et les deux sont plus ou moins nationalisés (comme presque toute l'économie malaisienne dont Petronas), mais il y a quand même nuance.

Proton a démarré en 1983 par l'automobile via des accords avec Mitsubishi, Modenas n'est apparu qu'en 1995 en construisant des Kawasaki.

Très utile: merci M'ssieur !

 

 

Merci Marc pour cet exposé très intéressant  

On peut (on doit) aussi placer la Malaisie dans une perspective plus générale qui place les "émergents" émergés au premier rang de nos disciplines avec le monopole (de décision et d'étiquette pour le moment) des indiens en Moto3, encore eux en WSS et un champion du monde (Sam Lowes  ) porté par une écurie russe (Yakhnich).
En attendant le retour des chinois ?
Un monde qui bascule.

Monopole des indiens en Moto3?

 

Il manque juste un petit morceau de l'histoire : après le victoire d'OJ en 250 chez Tech3, les motos YZR250 étaient reprises par une écurie Malaisienne, où elles roulaient en couleurs Petronas. Le pilote le plus connu de cet époque était probablement Seb Porto. Cet équipe avais déjà tourné avec des Yamaha TZM pendant quelques années, malgré le fait que les Yamaha n'étais pas vraiment au niveau de l'Aprilia, ni même des Honda kittée... c'est peut-être un facteur dans le lien Yamaha-Petronas en MotoGP plus tard.

[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

(Photo Yamaha)

Merci Graham.
Je compléterai après Le Mans...

 

J'adorais Seb Porto - Il était souvent bien placé (avec le rames sorties c'est vrai)
et puis il a disparu des écrans -

Il manque aussi la version route proposée par Proton /KR vers 1997/98 et animée par un monocylindre si mes souvenirs sont juste , sinon très bel exposé Marc

Bravo Marc !

Je ne sais pas si on a déjà fait un post sur l'aventure Petronas, alors je m'y risque (je mettrai des photos plus tard)

Le projet initial conçu par Sauber, dont le sponsor en F1 était Petronas, était un 990cc, conforme au règlement MotoGP, dont le moteur fut présenté en avril 2001 à Suzuka, Petronas et Sauber cherchant un partenaire pour les chassis.

Une moto complète effectua des runs de démonstration à Sepang, en octobre 2001, aux mains de Niall Mackenzie.

Mais finalement, pour des raisons encore inconnues à ce jour, Petronas décida de ne pas s'engager en MotoGP mais en superbikes.
La rumeur veut que Sauber et Petronas étaient entrés en négos avec plusieurs teams pour participer au championnat MotoGP 2002, mais que Sauber était trop gourmand.

Donc, Petronas annonce soudain que son moteur sera aligné en superbikes et non en motoGP, sous la direction de Carl Fogarty.
Sauber sort du projet, et le 3 cylindres dut être intégralement repensé, devenant un 900cc pour bénéficier du règlement qui avait fixé des échelles de poids différentes pour les 750-4 cylindres, les 900-3 cylindres et les 1000-2 cylindres.

Benelli aussi avait voulu tirer parti de ce règlement pour sa Tornado 900-3, mais Benelli avait déjà une moto de route, alors que, contrairement à ce qui était prévu en motoGP, il allait falloir faire homologuer la Petronas en fabriquant une machine de route à 150 exemplaires.

C'est Eskil Suter qui obtint de Petronas le marché de reconception du moteur, avec pour objectif de participer dès la première course de 2002 au championnat WSB. Lors de la conférence de presse de présentation du team en décembre 2001, Foggy annonça qu'il était prévu de lancer 10.000 motos de route, dont il superviserait personnellement le développement.

Finalement, ce fut une catastrophe, Suter étant complètement dépassé par une tâche qui, de son propre aveu, dépassait ses capacités de l'époque.
En février 2002 il n'en était qu'aux rendus 3D du moteur sur ordinateur, malgré des embauches et des achats de matériel grâce aux subsides de Petronas.

En mars 2002, Foggy exprime ses doutes sur Suter, ouvertement, explique que c'est Petronas qui l'a choisi et pas lui, et qu'il ne savait pas que Suter avait des compétences en conception de moteurs... ambiance ! Il indique même que tout le reste sera prêt et compétitif, mais qu'il a des doutes sur le moteur.

En mai 2002, les ateliers de l'équipe Foggy Petronas, entièrement financés par Petronas, sont opérationnels ; ils auront coûté la bagatelle de 1,5 millions de livres sterling ! (et comme ce petit malin de Foggy a créé sa propre société, financée par Petronas qui n'est que sponsor, tout appartient à l'Anglais bien qu'il n'ait pas déboursé un shilling...) Foggy est très fier de montrer son quartier général à la presse, et insiste sur la présence d'une salle de prière, car des employés Malaisiens musulmans viendront travailler là. Mais il précise qu'en fait c'est surtout lui qui va aller prier, pour que les moteurs finissent par arriver !

Foggy avait prévu de montrer les machines fin mai à Silverstone, avant la première course à Laguna Seca en juillet, mais les moteurs ne sont pas prêts et il annule tout. Corser et Haydon feront des tours de parade à Brands Hatch pendant l'été, sous les ovations du public, mais les motos de route ne sont pas prêtes et Foggy annonce que les débuts en course sont reportés à 2003

75 machines de route seront assemblées à la hâte en Angleterre, en janvier 2003, le temps que la chaîne de fabrication soit mise en place en Malaisie, chez Modenas qui avait signé un contrat de sous-traitant pour Foggy-Petronas ; la FIM accepta que les 75 autres soient examinées plus tard. Pendant ce temps, Corser faisait des temps intéressants en essais à Phillip Island.

A Valencia pour sa première course, la Petronas se qualifia 4ème sur la grille, grâce à Troy Corser et ce dernier s'affirma confiant dans ses chances de décrocher une victoire rapidement.

Mais le moteur Suter surchauffait de façon chronique, et toute la saison 2003 fut handicapée par des problèmes techniques, et un manque de puissance.
En fin de saison, Foggy vire James Haydon, qui ne s'est jamais habitué à la moto, et il vire aussi Eskil Suter, pour confier le développement du moteur à Ricardo, un spécialiste britannique des moteurs de course. Du coup, les motos de route sont également retirées de la vente, pour que les modifications suggérées par Ricardo puissent être transposées sur les machines de route, histoire de ne pas risquer une disqualification.

Mais entre temps, le règlement avait changé, les 4 cylindres étant autorisés à cuber 1000cc comme les twins et les 3-pattes. Il en résultait que la Petronas partait avec 10% de cylindrée en moins par rapport à ses concurrentes, sans qu'il soit possible de tout recommencer en fabriquant un 1000cc...

La saison 2004 commence avec le moteur Suter, le nouveau n'étant prévu qu'à mi-saison. Pourtant Troy Corser parvient à signer une pole position en Allemagne, et à Misano il passe la plus grande partie de la course en tête, avant d'être doublé en toute fin de course par Laconi. A la fin de la saison, Corser aura décroché deux pole positions (et je me souviens de celle obtenue à Magny Cours, pour la dernière course de l'année, j'y étais le tour de superpole de Troy était sublime) et deux podiums, en tout et pour tout. Corser finit 9ème au classement, Chris Walker 11ème, les deux pilotes étant handicapés par le fiabilité incertaine du moteur.

Lassé, et peu convaincu par les qualités de manager de Foggy, Troy Corser quitte le navire fin 2004 à l'issue de ses trois ans de contrat, et signe chez Alstare, avec la Suzuki duquel il décrochera son 2ème titre de champion du monde dès l'année suivante.

Une nouvelle version du moteur est présentée pour 2005, mais les nouveaux pilotes, Garry McCoy et Steve Martin, n'obtiendront aucun résultat probant, finissant 22ème et 18ème au championnat, pendant que les motos de route ne sont toujours pas disponibles à la vente, en contravention flagrante avec les règles du WSB... Mais vu les piètres performances des Petronas, personne ne pose réclamation, ce qui évite de fâcher un peu plus le petrolier Malais. Officiellement les motos sont en vente 25.000 livres, mais il n'y a aucun distributeur en Europe et il faut les acheter directement en Malaisie, à une société NAZA Bikers Dream... Pas très étonnant que les acheteurs ne se précipitent pas.

McCoy se sauve à son tour au bout d'un an, mais Steve Martin reste et est rejoint par le jeune espoir Anglais Craig Jones, mais c'est le chant du cygne pour les FP1, d'autant que Foggy ne se cache plus pour dire qu'il en a marre. Martin signe deux qualifications en première ligne, à Phillip Island et Valencia, mais ce sera tout pour les récompenses.

Les Foggy Petronas de course tirent leur révérence fin 2006, Foggy essaie d'utiliser sa structure technique somptueuse pour essorer les frères Castiglioni, auxquels il propose un engagement en superbike avec les MV Agusta F4, mais les frères Castiglioni connaissent la course et ne donnent pas suite aux demandes financières exorbitantes de Foggy.

Foggy vendra tout le matériel acheté avec les fonds Petronas, dans une vente aux enchères historique, et, si cette aventure n'a pas contribué à gonfler l'ego de Carl, elle a en tout cas sérieusement gonflé son compte en banque

Alors la je dis un grand merci pour cette histoire  

 

  

Marc a écrit:

Monopole des indiens en Moto3?  

KTM, entreprise multinationale, assez diversifiée et fortement intégrée pour sa production, c'est rare, voit Bajajauto limited (limited pour le moment   ) monter dans son capital de façon pas vraiment anodine pour le secteur moto, en cohérence avec le choix de développement par le bas de la gamme de KTM avec les 125 / 300 indiennes, conservant la gamme haute faite de niches à forte valeur ajoutée dont l'avenir dira seul le bien fondé. Cette diversification est plutôt un gage de pérennité et de réalisme dans l'adaptation au marché.
Bajaj est très "heavy industry" comme beaucoup d'entreprises asiatiques. Elles produit pour de nombreux domaines dont à la marge des motos japonaises comme la Kawasaki Ninja 250R.
L'expression de monopole indien de ma part est peut être un peu leste, mais la tendance est là, ce que je veux souligner, comme le confirme Mahindra. Son investissement en moto3, en utilisant les compétences suisses existantes, affirme des prétentions commerciales certaines. Le phénomène de redistribution de la production mondiale non japonaise est bien l'évènement le plus spectaculaire où s'inscrit aussi la Malaisie. Le marché, l'intérêt des populations (et celui des marchands de spectacle) suit bien le même mouvement... très rapide.

Certes, certes...
De là à utiliser l'expression "monopole indien", il y a un pas que tu es bien le seul à franchir.

  pour Petronas.

Concernant Caterham, les spéculations actuelles sur le nom des pilotes (pas moins de 7 auraient été contactés, parmi les Top Guns) montrent bien que le projet est ambitieux et qu'il a les moyens de son ambition.
On a évoqué, durant un temps, une option "politique", probablement favorisée par la Dorna, avec un ou plusieurs pilotes asiatiques, mais il semble bien qu'on se dirige maintenant vers une option plus "efficace" visant à directement se battre pour le titre.
Pour les pilotes asiatiques, ils attendront un peu...

Côté techniciens, circulent déjà les noms de Johan Stigefelt comme Team Manager et Gary Reinders comme Responsable Technique.

Gary a déja son équipe de mécanos, ce depuis Brno ;Ça c'est sûr .
Stigefelt serait confirmé malgré les casseroles qu il traine dans le milieu

 

Peux tu en dire plus Zilo ?

15 000 spectateurs en 2008, 84 200 dimanche dernier.

Et le parking des spectateurs, c'était............. des scooters (photos Solomoto).

Fügner avait raison; on est foutu!


Bon, je blaguais, Fügner n'a jamais raison, par principe!

Ne t'en fais pas,
aujourd'hui les scooter, demain les motos ...

Marc a écrit:

15 000 spectateurs en 2008, 84 200 dimanche dernier.

Et le parking des spectateurs, c'était............. des scooters (photos Solomoto).

Fügner avait raison; on est foutu!

Bon, je blaguais, Fügner n'a jamais raison, par principe!

Va malgré tout en paix et repend toi  

Et on n'a encore rien vu...
Ça me rappelle la prise de contact avec le personnage à Dijon en 2011, il ne croise pas de martien tous les jours, il faut le comprendre, ça peut rendre inquiet.
En 2 années, il ne s'est rien passé  
Le recul que donne la distance à la planète rouge (Mars, hein) élargi la vision. A chacun sa spécialité, on ne peut tout connaitre.

On est le 16 octobre, il est 10h25, les banques existent encore, mais pourquoi je dit ça ?
Ah oui, j'ai confiance, too big to fail, c'est connu...

Jean-Michel Fügner, si tu n'existais il faudrait t'inventer!  

Tu dis "Et on n'a encore rien vu...". Peut-être.

Puisqu'on parle ici de la Malaisie et se sa montée en puissance il faut aussi évoquer l'Indonésie qui vue d'ici est encore plus floue que la Malaisie. Néanmoins, si on la regarde depuis la Malaisie, on en a un point de vue un peu plus précis qui pourrait nous faire penser que nous pourrions ouvrir un sujet "La montée en puissance de l'Indonésie" dans quelques années.

La Malaisie a indiscutablement un développement économique supérieur à l'Indonésie, elle le doit à son histoire récente bien plus calme que celle de l'Indonésie qu'on peut résumer par stabilité politique (facilitée par son histoire coloniale et son unité ethnique; on en dira pas plus, plb n'est pas un forum d'histoire contemporaine.. enfin pas que (  spécial Fügner).

La Malaisie (30 millions d'habitants) exerce une extraordinaire et pourtant discrète influence - bizarrement peu commentée par les milieux autorisés (comme disait Coluche) - sur l'Indonésie (250 millions d'habitants).

Je passe sur le sujet religion (La Malaisie et l'Indonésie sont des pays musulmans) pour aller de suite à la langue.

Le malais est la langue maternelle de 60 millions de malais dont les malaisiens (habitants de Malaisie) et de 30 millions de non malaisiens (les malais non malaisiens, on suit?...) dont 95% sont indonésiens. Si on compte bien, on a moins de 15% des indonésiens dont la langue maternelle est le malais alors que la langue officielle indonésienne est le malais. Pour être plus précis, on a le bahasa indonésien et le bahasa malaisien, un peu comme on le français français et le français belge.
Cela veut dire qu'on oblige 220 millions d'indonésiens à apprendre le malais pour pouvoir être indonésien (vive l'école, où le malais est enseigné, ce formidable vecteur de liberté...).

Il en ressort que les indonésiens ont un regard tourné vers les malaisiens et ont tendance à vouloir les copier dans un mélange de méfiance et de jalousie.
Il en ressort que la Malaise exerce un pouvoir culturel très grand sur l'Indonésie et qu'elle ne s'en prive pas même si elle y fait un pas en avant puis deux pas en arrière au gré des événements comme dans toute relation 'je t'aime, moi non plus".

En matière de compétition moto, c'est aussi le cas.

Un exemple qui illustre ce point pour nous ramener à notre passion :
Dans les années 1990, la Malaisie avait un grand circuit, le pouvoir indonésien en voulait un aussi. Le fils du président indonésien d'alors en a construit un (pas de ces mains!) pour recevoir les GP moto et la F1. Il y a eu une manche de WSBK puis plouf car la famille au pouvoir a sauté (je fais un raccourci) et ce circuit proche de Jakarta a eu des hauts et des bas mais il a été utilisé par les locaux pour s'entraîner. Plusieurs projets de circuits sont dans les cartons.

On peut contre-argumenter que les indonésiens ne sont pas des industriels et des financiers. C'est en partie faux. De nombreux jeunes indonésiens sont dans les universités américaines et même quelques uns en France. Il faut rappeler qu'un des hommes forts de l'Indonésie dans les années 90 a été un ingénieur très en vue de Messerschmitt en Allemagne dans les années 70 et 80. Ce ne sont pas des ignares en la matière. Ils sont aussi d'adroits commerçants même si le commerce est encore détenu en grande partie par la diaspora chinoise mais qui tend à perdre de sa puissance sous les coups (au propre comme au figuré) des ultras nationalistes/islamiques (rayé la mention en trop). Par exemple, une grande dynastie indonésienne (reine du caoutchouc entre autre) et proche du pouvoir post colonial quelques soient ses errements était dirigée par 3 frères dont un était chrétien, un musulman et un boudhiste!

Gageons que si la stabilité politique et la diminution des conflits ethniques (mots modernes et pudiques pour dire guerres de territoires et de pouvoirs) indonésiens permettent le développement économique massif de ce pays, il prendra la même voie que la Malaisie en matière de compétition moto mais avec un rapport de population de 8 à 1 ! Elle n'aura pas à défricher un terrain il le sera déjà, il n'y aura plus qu'à le cultiver.

A cela il faut ajouter aussi le fait que l'Indonésie est le deuxième marché du tabac. Les Malbarrés et autres seraient bien en chance de refaire ce qu'ils ont fait dans les années 70 et 80 en Europe alors aussi second marché du tabac. Ce sera plus dur pour les Kronemville ou Martinol car les mollahs guettent du haut de leurs minarets.

L'Indonésie est le premier pays musulman du monde. Force ou faiblesse? Wait and see.

Très intéressant éclairage.