La définition de halope#19 est la plus couramment entendue mais si elle n'est pas fausse, elle est partielle et ne répond qu'au besoin de mettre moins de fils pour gagner du poids ou faire des économies. Rendons à César ce qui est à César, le multiplexage n'a longtemps été que çà car il est déjà vieux ce brave système, utilisé par les télécommunications avant même l'invention du téléphone,c'est dire.
Cette définition est une des idées qui courent les paddocks, elle est juste mais elle ne décrit pas ce qu'est le multiplexage ni surtout son véritable intérêt.
Celle de Toop décrit bien l'intérêt du multiplexage tel qu'il est utilisé dans les motos.
Pour arriver à ce que décrit Toop, il ne suffit pas de véhiculer du courant électrique même en gérant son droit ou son non droit à circuler (ouvert/fermé). Il faut des signaux numériques.
Bien sûr "circuler-pas circuler" est du numérique dit binaire (le fameux bit) mais on ne peut pas en faire grand chose tel quel. On doit utiliser des systèmes plus "puissants" en combinant des bits. Si on met huit bits ensemble on obtient un octet (byte en anglais). On a aussi tous entendu parler du système hexadécimal ou 16 bits (les anciens ayant utilisé des calculettes HP hexa, levez le doigt!). Le nombre de bits choisi est appelé la résolution pour les spécialistes.
Sans aller trop dans le détail, on sent déjà que plus le système utilisé a de bits et plus les calculs pourront être puissants (cad rapides ET grands). Dans le sens moderne donné au terme multiplexage, il y a cette notion de système plus puissant que "circuler-pas circuler".
Maintenant que nous avons posé cette faculté, on comprend qu'on va pouvoir utiliser des calculateurs (ce sont les fameux microprocesseurs) qui vont calculer. merci La Palissse, mais des fois il faut le rappeler. Ces calculs sont des modèles mathématiques qui représentent des lois de comportement des éléments de la moto.
On calcule quoi à partir de quoi dans une moto?
Une moto moderne est bardée de capteurs (vitesses, températures, angle, régime moteur....) qui émettent des informations comme des intensités, des résistances, des tensions... Ces informations sont dites analogiques, c'est à dire qu'elle varie en continu un peu comme l'aiguille d'un compteur de vitesse qui tourne sans à-coup dans un sens ou dans l'autre.
Pour pouvoir faire des calculs en utilisant des informations analogiques (par exemple, l'angle pris la moto et le régime moteur) il faut les numériser, c'est à dire donner une valeur unique et fixe à chaque portion de valeur de l'information analogique (par exemple, sur un compteur de vitesse digital - sans aiguille - on affichera 101 km/h pour une vitesse comprise entre 100,5 et 101,5 km/h, c'est ce que j'appelle portion ici). C'est cela qu'on appelle le codage de l'information. C'est ce qu'on appelle aujourd'hui le CAN (Convertisseur Analogique Numérique) => Attention, ce CAN est un faux ami. cf plus bas.
On comprend alors que plus la portion analogique prise en compte est petite et plus le calcul sera précis. C'est ce qu'on appelle le taux d'échantillonnage pour les spécialistes.
On comprend aussi que plus on a de capteurs et un un codage performant (fort taux d'échantillonnage donc des petites "portions" et haute résolution donc beaucoup de bits), plus cela va être difficile de faire des calculs ET de faire parvenir les informations aux calculateurs car elles seront très nombreuses et fréquentes.
Pour pouvoir faire tout cela, on fait appel à plusieurs calculateurs (microprocesseurs), ils peuvent être dans un même boîtier mais ils peuvent aussi être dans plusieurs boîtiers différents.
On a donc des dizaines de capteurs et plusieurs calculateurs. Certains capteurs doivent fournir leurs informations à un seul calculateur, d'autres à 2 et d'autres à trois... Certains calculateurs ont besoin des résultats calculés par d'autres calculateurs pour calculer les leurs.
Bref, si on n'organise pas tout ce petit monde, c'est le bordel!
On doit créer un réseau de communication entre tous.
Pour éviter d'avoir des kilomètres de fils et de connecteurs, on a eu l'idée de faire passer plusieurs informations sur dans un même fil électrique. C'est ce que rappelle halope#19.
Pour info, il y avait 3 km de fils électriques dans une Mercedès haut de gamme avant le multiplexage alors que les fonctions ABS et antipatinage étaient basiques.
Ok, c'est fait mais si l'un parle chinois et l'autre javanais, ce sera toujours le bordel.
On doit utiliser des protocoles, c'est à dire des conventions et des modalités d'applications.
Il existe plusieurs protocoles utilisés dans les véhicules, dans la moto on utilise presqu'exclusivement le CAN (Controler Area Network) de Bosch qui a l'immense avantage d'utiliser une simple paire de fils comme support d'information, paire de fils qu'on sait bien manipuler en électricité moto depuis des lustres. La partie filaire du réseau de trucs et de machins ressemble donc physiquement à n'importe quel faisceau électrique de moto, il est juste plus simple car, à nombre de trucs et de machins égal il contient moins de fils.
On parle souvent de CAN Bus ou de Bus CAN en français. Kesako?
Un CAN Bus est l'ensemble (ses composants électroniques et le protocole lui-même) de l'interface de multiplexage qui coordonne (met en réseau) tout ce monde de capteurs, calculateurs et composants agissants.
On entend parfois que le CAN Bus est le gros connecteur qui se branche sur l'ECU, c'est une des fausses idées qui circulent dans le paddock. Ce gros connecteur est un... connecteur.
Cette idée fausse et le fait qu'on connaisse bien ce qu'est une paire de fils, font sans doute qu'on simplifie notre compréhension du multiplexage en le réduisant à "on fait passer plusieurs informations sur un même fil électrique=> j'allume mon feu stop et mon clignotant arrière droit avec le même fil".
En schématisant on peut dire que tout ce petit monde sait communiquer grâce un super organisateur : chacun a un rôle bien défini.
Il y a l'informateur (le capteur de position d'AAC ou un bouton du commodo par exemple) qui informe le maître (le calculateur) qui va prendre une décision (résultat du calcul) et donner un ordre à un esclave qui va exécuter cet ordre (injecteur, bobine d'allumage ou ampoule de phare par exemple). On a un monde simple et bien ordonné qui de plus n'utilise que quelques autoroutes plutôt que plein de nationales départementales et chemins vicinaux.
Enfin, des fois çà se complique car pour pouvoir être performant il faut hiérarchiser les ordres, les maîtres n'ont pas tous le même pouvoir selon la fonction esclave mise en oeuvre par exemple. C'est là qu'on retrouve la notion de stratégie citée par Toop.
Malheureusement, on comprend pourquoi parfois dans sa voiture moderne, on allume ses phares puis la vitre électrique refuse de fonctionner. Parfois, il suffit de d'allumer ses feux stop simultanément avec un coup de klaxon pour que la vitre refonctionne... j'exagère... à peine! Dans bien des cas, ce n'est pas la lecture d'un code panne qui résoudra le problème, c'est une analyse logique du système qui le fera. C'est pourquoi un "passage de valise" chez son concessionnaire ne donne rien dans ces cas là.
Le savoir et les outils d'analyse des "mécaniciens" doivent progresser tout comme la qualité de ces systèmes (hardware et surtout software).
Restons optimistes. Si on ajoute à ce multiplexage des microprocesseurs de plus en plus performants, the sky is the limit comme disent les anglais.
Cela peut faire peur (un robot en guise de pilote, voire pas de pilote du tout?!) ou bien exciter les neurones pour en tirer plus et mieux.
J'ai essayé d'être compréhensible (si, si!) et de montrer que les définitions de halope#19 et Toop sont complémentaires.
J'ai fait des raccourcis, aussi je prie les puristes et spécialistes de m'en excuser par avance et/ou de nous faire part de leur savoir.