Se situer à la mi-saison est un moment propice pour faire le point avec les différents intervenants des Grand Prix, ces derniers possédant en général un emploi du temps moins chargé qu'à leur habitude.
Nous entamons notre série d'interview avec Jules Danilo qui, s'il reste médiatiquement en retrait des ses petits camarades francophones, n'en progresse pas moins régulièrement. Dans une catégorie ultra-compétitive, et malgré quatre abandons et deux frustrantes 16èmes places, le pilote Ongetta Rivacold a néanmoins pu marquer des points à deux reprises, et est passé près de l'exploit avec une qualification en 6ème position au Mans.
Nous avons pu poser quelques questions au numéro 95, auxquelles, comme à son habitude, il a répondu avec lucidité et franchise.
Jules, après cette première moitié de saison, éprouves-tu un mélange de satisfaction et de frustration?
Jules Danilo: "Oui. Il est vrai qu'à mi-saison, le bilan est un peu Up And Down. Je n'ai pas eu beaucoup de chance lors des premières courses puis ça a commencé à aller mieux mais j'ai subi quelques trous d'air, surtout en course. Souvent, j'ai eu du mal à concrétiser lors du dernier tour; soit je tombais, soit je faisais des bêtises et je ne marquais pas de point. Dernièrement, au Sachsenring, et même si ce n'était pas ma meilleure course depuis le début de saison, ma fin de course a été bonne. J'ai réussi à me battre devant dans le groupe et à être devant au bon endroit dans le dernier tour, c'est important parce que c'est très difficile de doubler sur ce circuit, et je termine en marquant un point. C'est la première fois que j'arrive à bien gérer le dernier tour. Il y avait seulement deux places dans les points pour 6 ou 7 pilotes mais j'ai réussi à être dedans. C'est donc une satisfaction après deux courses où je finis16ème, la place la plus frustrante."
On voit que maintenant, tu évolues régulièrement au milieu du plateau, et c'est une progression par rapport à l'année dernière. En schématisant, cela veut dire que tu fais partie du deuxième groupe en course. Peux-tu nous expliquer ce phénomène de groupes car, parfois, on a l'impression qu'il suffit de peu de choses pour se situer dans l'un ou dans l'autre?
Jules Danilo: "Je pense qu'une grande partie se joue lors de la qualification. Même si en course je suis souvent dans le deuxième groupe, mis à part au Mans je suis assez loin aux qualifications. Après, tout est joué car le leader est souvent en pole; il est le plus rapide et tire le groupe, et tous ceux qui peuvent s'accrochent derrière. Moi, le temps que je remonte, il est un peu tard... C'est donc mon principal problème; il faut que je me qualifie mieux pour espérer me battre, de temps en temps avec le premier groupe quand il est grand, et sinon dans le deuxième groupe, comme à Assen où on se battait à huit pilotes pour la place de huitième."
En rythme de course, tu te situe où?
Jules Danilo: "Si je fais une moyenne, j'obtiens 7 dixièmes. Au Sachsenring, par rapport à Kent, j'étais à une seconde, et à 4 dixièmes par rapport à ses poursuivants. Vu de l'extérieur, ça ne paraît pas énorme; quelles sont les pistes pour réduire cet écart? Au Sachsenring, j'ai remarqué une chose. Pendant la qualification, j'ai beaucoup roulé seul et je suis arrivé pas loin de mon maximum. Du coup, quand j'avais une roue, je ne gagnais pas énormément. Là, on aurait sans doute pu mettre d'autres réglages pour aller chercher ces 4 dixièmes en plus qui m'auraient permis de coller en début de course."
Tu veux dire pour tirer bénéfice d'une éventuelle roue en qualification?
Jules Danilo: "Oui, voilà. C'est à dire que je suis parti et ai fait tout le premier run tout seul. J'ai poussé vraiment fort et mon meilleur temps à été de 1.28.1. Puis on a remis un pneu neuf et j'ai fait 1.27.8 alors qu'en début de course j'ai refait ce temps. Ce que je remarque, c'est que mon rythme de qualification, c'est souvent mon rythme de course alors que je devrais aller plus vite en profitant d'une roue."
Ces 4 dixièmes, tu sais où il faudrait aller les chercher?
Jules Danilo: "En tout cas, pas dans les courbes rapides. Là, je suis tout le temps correct, voire mieux. A la remise des gaz dans les virages lents, c'est là où je perds le plus. Au Sachsenring, c'était dans les #1, #5 et dans le dernier virage."
Et pour les qualifications?
Jules Danilo: "J'ai tendance à pousser dès le début et à me crisper. Pour aller chercher un chrono, il faut pousser mais il faut aussi être relâché. Si on est trop crispé, on commence à garder les freins et à réduire la vitesse de passage. Donc il faut pousser mais être relâché, conserver sa vitesse de passage, être fin sur les gaz, reprendre la poignée tôt. C'est là-dessus où j'ai à gagner. Avec la nouvelle règle (ndlr: interdiction d'attendre une roue), l'idéal serait de construire plus rapidement ma séance et de placer mon chrono avec un pneu neuf. Ce serait plus tranquillisant pour le reste de la séance parce que là, je pars, à mi-séance le chrono n'est toujours pas bon et ça fait monter le stress, ce qui me déconcentre un peu en fin de séance. Si j'arrivais à partir et à bien exploiter le pneu rapidement, ça me tranquilliserait pour la fin de séance et je pense que je pourrais encore améliorer."
Quel est ton avis sur les nouvelles pénalités pour la qualification?
Jules Danilo: "A Assen, ça c'était bien passé mais au Sachsenring, ça a un peu recommencé. Les pénalités ont donc été appliquées et c'est très bien puisque presque tout le monde avait joué le jeu. Ceux qui ne l'ont pas fait en ont tiré un gros avantage donc c'est normal qu'ils soient rétrogradés."
Physiquement, quel est ton entraînement?
Jules Danilo: "Je vais à la salle, je fais de la course à pieds, du vélo et du Supermotard. A la salle, je travaille exclusivement pour la moto avec Benoît Compargue qui m'envoie des programmes vraiment adaptés à la moto comme, par exemple, les pompes stato-dynamiques. Cela est très bon pour tous les forts appuis sur les bras, comme lors des freinages."
Comment abordes-tu cette deuxième partie de saison?
Jules Danilo: "On arrive sur des circuits que j'aime beaucoup et où ça avait commencé à aller de mieux en mieux l'année dernière, donc c'est aussi plus rassurant, comme Indianapolis ou Brno. Comme je l'ai dit, j'aime bien les courbes rapides, surtout avec la Honda; le châssis est stable, la moto ne bouge pas, elle se dirige vraiment bien et c'est vraiment agréable. Maintenant, je vais être honnête; j'aurais aimé partir en vacances avec de meilleurs résultats pour être un peu plus tranquille car c'est maintenant que l'on commence généralement à parler pour l'année prochaine. J'ai pu le constater l'année dernière avec Brad (Binder). Ca m'aurait tranquillisé de terminer toutes ces courses où j'étais dans les points, mais ce n'est pas le cas, donc les courses qui arrivent vont être très importantes, à commencer par Indy et Brno."
Où aimerais-tu être l'année prochaine?
Jules Danilo: "Dans l'absolu, j'aimerais vraiment rester dans mon team car je m'y sens très bien et m'entends aussi très bien avec l'équipe et le chef-mécano. Quant aux résultats, j'aimerais être dans le Top 10 tout le temps et me battre pour le podium. Comme on l'a dit, en Moto3, ce sont des histoires de groupes et si la chance se présente, il faut savoir la saisir. Mais je préfère me concentrer sur cette demi-saison à venir car il ne sert à rien de faire des plans si je ne suis pas sûr de rester en mondial."
C'est tout ce qu'on te souhaite, Jules! Et merci pour cette interview!
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Un p'tit clik vaut mieux qu'une grande claque; c'est Harry qui l'a dit!
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