Beaucoup se sont étonnés du classement inhabituel du GP d'Allemagne où, Esparagaro mis à part, peu de favoris ont rallié les premières marches du classement.
Parallèlement, on a vu une épidémie de pneus détruits après l'arrivée.
Relation de cause à effet?
Pour en savoir plus, j'ai interrogé un ingénieur directement concerné par ces phénomènes puisque officiant en Moto2.
Voilà ce qui en ressort...
Tout d'abord, ce phénomène de décollement de morceaux de gomme s'appelle le "blistering", du nom de l'enveloppe en plastique qui recouvre les petits objets en vente chez votre marchand de journaux. Dans le cas qui nous intéresse, la moto, cela correspond à la gomme qui enveloppe la carcasse.
Quand le pneu est physiquement très sollicité, le collage de la gomme sur la structure se délite partiellement, créant ainsi de petites micro-bulles d'air (la nature a horreur du vide); celles-ci montent en pression, grossissent, grossissent, et finissent par exploser en décoller des morceaux entiers de gomme.
Généralement, le pilote s'en aperçoit par des phénomènes vibratoires et baisse de rythme.
Anecdotiquement, s'il était seul en piste, il pourrait également s'en apercevoir phoniquement car l'explosion de la bulle d'air est très sonore. C'est ce qui se passe, en autre, sur le très rapide circuit Michelin de Ladoux où les pilotes d'essais roulent parfois jusqu'à obtenir du blistering, le "bang" caractéristique signifiant alors la fin de séance...
Quels sont les facteurs influents?
- La température de piste.
- La pression.
- Les efforts physiques sur le pneu.
Concernant ces derniers, il y a ceux auxquels on pense tout de suite, comme le nombre de virages à gauche successifs au Sachsenring, mais il y en également d'autres, plus subtils.
Effectivement, on a pu noté, en Allemagne et à Austin, que les Kalex sont généralement plus sujettes au phénomène.
Cela est dû à leur bras oscillant un peu plus court qui charge plus le pneu arrière que sur les Suter.
Mais attention, une roue arrière de Suter réglée très en avant dans le bras oscillant peut engendrer les mêmes conséquences!
De plus, la façon de piloter intervient également; un pilotage "typé 125", avec une grande vitesse de passage en courbe maltraitera moins le pneu qu'un pilotage davantage "typé MotoGP" avec ses trajectoires cassées et ses remises de gaz violentes.
Enfin, pour ceux qui, comme moi, ont essayé dans un premier temps de relier les décollements aux seuls pneus tendres, c'était bien tenté mais, en l'occurrence, pas assez corrélé.
En effet, si en théorie, cette hypothèse tient la route par l'élévation de température engendrée par un pneu soft, dans la pratique les deux gommes proposées par Dunlop sont beaucoup trop proches l'une de l'autre pour que cela soit un critère déterminant.
A l'inverse, la pression utilisée est un facteur déterminant et certains pilotes, en l'abaissant pour trouver "artificiellement" un peu plus de grip, ont peut-être été trop loin et maltraité la gomme qui s'est désolidarisé de la structure...
Malheureusement, aujourd'hui en GP, si on arrive à connaître la qualité des pneus choisis par les pilotes, on n'a évidemment aucune information sur les pressions.
Merci pour toutes ces informations à celui qui se reconnaîtra...