5 BIS CHAPITRE Les passagers ne sont pas que des singes.
Pour que tout le monde s’y retrouve dans les chapitres qui suivent, je vais vous présenter mes trois passagers, et dans le chapitre suivant, notre inénarrable mécano FIFI, qui fut un excellent passager remplaçant.
Je ne suis pas en révolte avec les gens qui surnomment un passager, "le SINGE", mais ça dépend dans quel sens c’est dit, et par qui. Il est vrai que parfois, quand le public parle de la sorte des passagers, on a l’impression que souvent cela est dit avec un brin de moquerie, comme si le singe n’était qu’un bout de viande qui servirait de lest. Et surtout on a l’impression que les gens viennent de percer un secret en découvrant un jargon privé réservé aux inities.
C’est vrai ! Souvent, ça m’énerve ! Ma femme dirait : qu’un rien m’énerve.
Les passagers se sont des gens entiers, de caractère, toujours très attachants, et très dévoués à leur pilote. Ils sont les témoins directs de leur talent. Dur au mal, ils ne se plaignent jamais.
Une fois que ça roule, le passager à la même responsabilité que le pilote, ou est vraiment à 50/50. L’un de nous fait une connerie, et on va à la faute, voire plus.
Les miens ont tous été des amis, je pense avoir été fidèle envers eux, et ils me l’ont bien rendu.
Certains avaient été courtisés par d’autres pilotes pour aller courir en Grand Prix, ils m’en ont toujours parlé, et ils ont toujours refusé d’eux même. Les propositions émanaient pourtant de grands noms de notre sport.
Mon premier passager saisons : 69/70/72/73
Michel GOBBE (dit Gobbé) que très vite on a appelé le môme, à cause de sa bouille de gamin.
Comme je l’ai déjà dit dans un autre chapitre, Michel tout fraîchement débarqué de sa Normandie (débarquer/Normandie jeu de mots) et débarquant (faut que j’arrête) à Moto Presse, pour son malheur ou son bonheur, celui qu’il rencontra en premier ! C’est moi ! il n’avait avec lui que son side-car pour travailler. Bien sûr, je l’héberge en attendant ! Et c’est là que notre amitié va commencer (pas le fait qu'il couche chez moi ! pas de ça chez nous !)
Comme passager, Michel avait un grand avantage, il conduisait comme moi un side-car toute la journée.
Il était très vif et de petite taille, par rapport à un châssis d’aujourd’hui, vu la petitesse des sides de l’époque, c’était un plus. Il avait un ressenti exceptionnel, et on s’est très vite compris, on a été complémentaire immédiatement, nous avons été opérationnels dès la première course.
Avec Michel, on a fait toute la saison 1969/1970, et un bout de 1972 et 1973. Pour des raisons que je n’avais pas compris à l’époque, il me fait savoir début 73 qu’il ne pourrait bientôt plus faire mon passager, car professionnellement, ça allait lui poser des problèmes (on ne travaillait plus à la presse depuis un moment).
J’ai été très atteint par cette décision, mais bon, ainsi va la vie.
Un matin de 1974, j’apprends son décès, une affaire sordide que, si j’avais su, j’aurais tenté d’arrêter, afin que ça ne se termine pas comme cela s’est malheureusement terminé.
J’étais à mille lieues de comprendre la grosse bêtise qu’il avait faite, malheureusement, les gens qui l’ont fait disparaître n’étaient pas des enfants de chœur.
Par contre, j’ai tout de suite compris la raison pour laquelle Michel avait mis de la distance entre nous ! Il avait voulu me protéger, c’était gentil.
Mais là, MICHEL !!! (Je m’adresse à lui), pourquoi à un moment tu ne m’as pas appelé au secours. On n’était pas à un risque près tous les deux.
On aurait put tenter encore un beau chrono, pour te mettre hors de portée.
Je ne passe pas une seule fois en Normandie sans aller sur sa tombe.
Merci Michel pour tous les bons moments.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image] Mon deuxième passager saisons : 73/74/75
Sylvain DETOURNAY. Je le rencontre à mon magasin, je lui réglais sa KAWA H2, il était au courant que je cherchais un passager, ayant toujours été attiré par ce sport, il me dit qu’il était tenté par l’aventure et prêt pour tester le truc.
Lui, venait du parachutisme où il avait fait partie de l’équipe de France de vol relatif ,et il avait fait partie de l’équipe qui avait fini 2ème au championnat du monde : le stress et la concentration, il connaissait. Pendant la saison 73, Michel et Sylvain se partageaient la place, le temps que Sylvain soit opérationnel.
Cependant, en 1974 quant Michel ne courait pas avec moi, Michel nous rejoignait très souvent sur les circuits, comme groupie (salope Michel) (rire)
Autant avec Michel on s’était tout de suite accordé (et oui, on faisait le même métier), qu’avec Sylvain, ça a été un peu plus compliqué. Sylvain était un éternel insatisfait, même quand on gagnait, il y avait toujours un truc qui ne lui plaisait pas, parfois c’était sous le ton de la plaisanterie, car il était très taquin, mais parfois, c’était au premier degré.
A certains moments, je lui demandais de se placer différemment sur la planche et lui me disait que si ça ne se passait pas comme je voulais, c’était de ma faute.
On a un peu ferraillé ensemble, et ensuite, au bout de 4 à 5 courses, il a bien voulu partager les techniques, et il s’est aperçu que c’était mieux comme cela.
Sylvain a été un très bon passager, qui m’était envié de pas mal de pilotes, même si, quant même, Michel était un ton au-dessus.
J’ai appris la mort de SYLVAIN par les journaux, dont il avait fait la première page, sauf que sons nom n’était pas inscrit et c’est bien comme ça.
Comme pour Michel, je n’ai pas envie de m’étendre trop sur le sujet.
Quand Sylvain a disparu, je me suis dit la même chose que pour Michel ! Mais comment peut-on en arriver là ??
C’est seulement le jour de son enterrement (on n’était que 4 présents ce jour-là) que j’ai fait le rapprochement avec ce que j’avais lu dans les journaux ! Une horreur !
Pour faire court : une brouille familiale avait fait trois morts.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Je sais vous avez déjà vu cette photo ! Sylvain est a droite.
Même s’il faut admettre que l’on ne peut contrôler tous les événements de la vie, on ne va quand même rester sur une note d’humour.
Vu que jusque là, je n’avais pas été performant en temps que patron pour choisir mon petit personnel, sur le troisième passager j’ai tenté de faire un recrutement plus efficace.
Ça, c’est fait
Mon troisième passager saisons 93 à 96
Philippe OUROUZE. Marin devant l’éternel. On l’a tous appelé d’entrée "matelot" ou "la Bretagne" (logique)
Travaillant aux affaires maritimes comme flic de la mer, il avait pas mal de temps libre. Il était le pauvre propriétaire d’une BFG (aiiie, pas sur la tête) il avait entendu parler de moi, et de la marque de side-car JEWELL, et bien logiquement, il m’acheta dans les années 1982 un side-car et une fourche, avec les roues de 15 pouces qui vont avec.
A cette époque, comme il était plongeur pour son travail, on allait souvent dans sa région pour barboter dans l’eau avec lui.
C’est bien plus tard (fin 1991) que je décidais de remettre le couvert et que pour attaquer la saison 1993 je me remis à construire un side pas comme les autres.
Philippe a énormément participé à la construction de ce side, étant un roi de la maquette de modèle réduit, c’est lui qui a fait tous les masters des carènes, et tous les moules pour enfin sortir les carénages.
Pour aboutir à un produit fini, il y a passé des heures et quelques éruptions de boutons,
Philippe fait partie des ceux qui ont toujours rêvé devant les courses de motos.
Le jour de sa première course, quand il est arrivé sur le circuit et qu’il a enfilé sa tenue d’artiste passager, il en a été lui-même le premier surpris, je pense qu’il était comme dans un rêve de gamin.
Certes nous avions énormément de travail pour finaliser notre proto, qui ne ressemblait à aucun autre side-car, les copains pilotes nous avaient appelé les forgerons des circuits, c’est vous dire !
Philippe et moi-même on découvrait notre nouvel engin et on avait tellement de chose à faire pour valider nos idées à la con, qu’on a mis 4 à 5 courses pour arriver à se caler.
Certes, c’est vrai qu’au début j’avais du mal à m’exprimer et retrouvais difficilement mes marques, car Philippe apprenait tout du métier, en plus la manière dont il devait se déplacer sur la planche, n’avait rien à voir avec un autre side, mais assez vite on a trouvé comment utiliser l’engin.
Philippe fut un compagnon courageux, qui a été présent 24/24, et qui n’a jamais baissé les bras.
Je regrette pour lui de ne pas avoir été plus performant, et de n’avoir pas pu être plus dans le TOP 5.
L’âge n’a pas arrangé les choses, de plus j’étais à mon compte et n’ai pas pu prendre le temps d’avoir le physique qu’il aurait fallu pour compenser la médiocrité de la puissance de nos moteurs.
J’en profite ici pour le remercier pour tout ce qu’il a fait, et m’excuse auprès de lui, de n’avoir pu faire mieux.
Contrairement aux deux comparses précédents ! je rassure tout le monde, il est encore vivant et à la chance d’être récemment rentré chez MICHELIN au département course.
Si ça ! ce n’est pas finir ce chapitre sur une note positive !!!
à suivre
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