Comme d'habitude, toute précision ou correction sera la bienvenue!2/ Les cadres-poutres en aluminiumEn 1974, Eric Offenstadt conçoit, fait couler et met en vente une première série de 11 poutres en aluminium, dotées d’un bras cantilever en fonderie, qui seront équipés de toutes sortes de moteurs, du 125 au 900cc.
Une « poutre Offenstadt », qu’est ce que c’est ?
Une pièce en fonderie d’aluminium produit par la société d’Eric, la S.M.A.C, qui inclue un réservoir de 9 litres et qui sert de cadre, permettant à une
moto de ne peser, à sec, que 99 (TZ 250) ou 103 kilos (TZ 350) !
Elle est concue pour fonctionner avec un bras oscillant en aluminum (ou magnésium, suivant les circonstances)
Eric est maintenant pilote officiel et à la tête du service compétition de Motobécane.
En toute logique, il sera le premier a utilisé ce cadre-poutre sur le projet de 350 GP trois-cylindres qu’il présente durant l’été à la presse française.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Notez l'inclinaison des bracelets...
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Présentation en septembre au Paul Ricard
Equipée également des jantes SMAC, et pilotée par Eric lui-même, cette
moto aura juste le temps de participer au Grand Prix d’Espagne, en septembre 74, où le dénivelé du circuit de Montjuich (Barcelone) aura raison de la chaîne de la
moto française, quelques temps avant que « Pépé » ne quitte définitivement Motobécane pour cause de désaccord avec ses dirigeants.
Curieusement, il existe très peu de photographies de cette
moto .
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Première et deuxième version du prototype de la SMAC Motobécane
A noter le carénage très enveloppant de la première version...
Anecdote révélatrice du caractère bien déterminé d’Eric Offenstadt, lors de la première sortie de la 125 Motobécane qu’il a développée, au Grand Prix de France à Charade, il finit dernier, à trois tours, après s'être arrêté au stand,…mais n’abandonne pas!
L’ancien champion de ski nautique, Victor Palomo, après des essais comparatifs réalisés au Paul Ricard, achète deux « poutres » et les aligne en Grand Prix avec des moteur Yamaha 250 et 350 TZ pour la saison 1975.
L’Espagnol obtiendra 2 podiums avec ces motos originales (Allemagne en 250 et Tchécoslovaquie en 350), plus quelques belles places (Suède en 250, Espagne en 350) ainsi que trois victoires nationales (Nogaro en 250 et 350, ainsi que San Sebastian en Espagne).
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Victor Palomo à Nogaro
A noter, qu’il utilise également la fourche inversée SMAC en magnésium, une autre « trouvaille » d’Eric Offenstadt, mise au point avec l’aide de la société De Carbon.
Bras et fourche magnésium pèsent 5 kilos tandis que les disques de freins en aluminium sont revêtus de tungstène sous plasma (oui, encore une idée « made in Pépé »).
Plus tard, Pépé dira de Palomo : « Victor a fait des super résultats, terminant onzième des Championnats du Monde 250 et 350 cc, mais il avait une assistance mécanique déplorable et il n'arrêtait pas de casser ses vilebrequins. »
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Eric Offenstadt et Victor Palomo
La même année, Tony Rutter participe également au championnat du Monde avec des poutres SMAC, en 350 et 500cc, marquant des points par deux fois.
Vic Soussan utilisa également une « poutre » sans toutefois en laisser la moindre trace où que ce soit, si ce n’est sur cette unique photographie.
Pas de trace, non-plus, de la « poutre » partie chez Yamaha Japon…
Par contre, une « poutre » a bien été vendue en France, et à un pilote Français!
Il s’agit du célèbre « Jacky H », alias Jacques Hutteau, que l’on ne présente plus, et qui a eu la gentillesse de bien vouloir fouiller dans sa mémoire et ses archives personnelles : «
c'était en 1975 et cette moto a fait sa première apparition en course à Rouen. Ce châssis cédé à bon prix par Eric était en fait celui qu'il avait utilisé pour y loger (peu de temps) un 350 Motobécane, si peu compétitif qu'il a vite arrêté l'expérience.
Eric ne s'en souvient pas, mais c'est à Karland, lors de la dernière course 74 qu'il m'a parlé de ce châssis, et comme Christian Peirs bossait à la SMAC, l'affaire s'est faite rapidement.
Nous avions monté un Yamaha 125cc TA dedans et elle a fait « baver » une grande partie du paddock et des spectateurs par son côté esthétique totalement différent de ce qui se faisait, avec, non seulement ce drôle de cadre poutre sans réservoir (la capacité de la poutre était suffisante pour les courses nationales), mais aussi les roues à bâtons, freins à disque AV et AR (un très joli SMAC à l'avant tout alu, et une simple « rondelle » d'alu à l'AR).
L'ensemble était peint en rouge métallisé, et le bord des jantes polis, pour un plus bel effet, comme beaucoup de pièces en aluminium de cette moto.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]La SMAC-Yamaha de Jacques à sa première sortie
Evidemment il fallait tout créer pour assurer le montage, et un sacré coup de main pour réussir à le faire. Pendant que Christian Peirs mesurait, calculait, montait et démontait, tous les soirs jusque minuit minimum après le boulot, ainsi que tous les week-ends, dans le petit garage au fond du jardin d'Athis-Mons, jusqu’à sortir cette très jolie moto, moi, je limais et je frottais ; cela avait été mon boulot durant tout l'hiver !
Le carénage a été acheté à Fesquet, pilote sur Maïco et grand fournisseur du paddock en polyester.
Pour la selle, en fait constituée simplement de l'arrière puisque l'assise faisait partie intégrante du cadre, j'étais bien embêté, ne trouvant rien qui me plaise, et qui puisse correspondre à ce châssis.
En rentrant du boulot à Sucy en Brie, je m'arrête chez Lucien Cordonnier (CORKI) qui fabriquait des châssis pour les Kawasaki, et, dans un coin de l'atelier, j'aperçois une ébauche de selle énorme, pas terminée, et laissée là pour être jetée ; je craque, à la grande surprise de Lucien qui me la donne, presque gêné que je puisse vouloir ce truc pas possible.
Pour le moteur, une préparation Germain, avec tout ce qui pouvait se faire de mieux ; sitôt perçu, mon salaire y passait !
Malheureusement, aussi fier que je pouvais être de montrer cette magnifique moto, et malgré tous les espoirs que j'avais fondé sur elle, j'ai eu tellement de soucis moteur que je n'ai pas réussi à exploiter le châssis comme on l'aurait pu.
Pourtant, à Pau Lescar, je croyais vraiment que j'allais pouvoir remporter la course en première manche devant la Motobécane officielle de Balloche, mais je suis tombé à la parabole...
Ensuite je suis passé chez Scrab pour le moteur, et j'ai quand même pu faire des trucs assez sympathiques avec ce châssis qui se mettait en glisse dans les virages. Impressionnant!!
Nous avions fabriqué le bras oscillant en tubes rectangulaires, mais avec l'amortisseur De Carbon cantilever, l'effort trop important sur la fixation inférieure nous a obligés à construire un renfort du bras oscillant vers la fixation du bas de l'amortisseur.
Faute de temps, et pour simplifier la chose, en regardant un vieux vélo posé contre le grillage du pavillon, nous avons eu l'idée, avec Christian, de démonter la fourche du vélo pour en faire les renforts souhaités....et çà a marché.
Eric m'avait fait essayer une fourche inversée (oui, déjà, avec des tubes de gaz De Carbon à l'intérieur), et nous avons monté cet ensemble à Pau en fin de saison, mais, faute de Tés adaptés (aucun déport), la moto n'était pas stable, et il nous a fallu renoncer.
Et puis en 76 sont arrivés les Morbidelli « Compétition-Client », et il a fallu les regarder passer.
N'empêche que c'est à Cognac que ma 125 SMAC m'a permis de gagner ma toute première course !»
Parallèlement, toujours en 1975, Pépé, qui ne doute de rien, aligne une SMAC 375 cc en endurance !
Pourquoi une « 375 » ?
Il s’agit en fait de la 350 équipée de cylindres et de pistons de la TZ 750.
Eric s’engage donc au Bol d’Or avec le peu connu Jean-Jacques Coq comme coéquipier.
Un projet fou puisque personne ne donne la moindre chance au petit 2-temps (numéro 47) face à l’armada des gros 4-temps : il est évident, pour tous, que la frêle machine de 112 kilos ne pourra jamais tenir 24 heures puisque son moteur n’est conçu que pour tourner une heure avant révision!
Pourtant, ses adversaires auraient dû se rappeler que la
moto avait lancé un avertissement en tenant 19 heures aux 24 heures de Spa, quelques semaines plus tôt...
Réservoir de 24 litres, trous d’admission des pistons bouchés par rivet « pop » et Araldite, pots de détente « maison », bras oscillant tubulaire chromé en place de l’alliage coulé (permettant un démontage rapide de la roue), freinage couplé sur la pédale de frein et fourche inversée en magnésium, carénage de TZ 700 pour une meilleure protection, le petit bolide vert (couleur du BHV) prend quand même 10500 tours/mn et tient vaillamment jusqu’à la ligne d’arrivée, qu’il franchit en 7ème position, à seulement 7 tours de la Yamaha TZ 750 de Boinet-Debrock qui vient déjà elle-même de réaliser un véritable exploit !
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Le nouveau bras oscillant en tube et son étrier coulissant
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Pistons bouchés à l'époxy!
On n’avait pas dû dire à Pépé que c’était impossible!
"
A une 1/2 heure de la fin nous étions sur le Podium avec un 350c!
Un pot cassé nous fait perdre 3 places.
Quelles sont les deux conditions indispensables pour terminer une course de 24 heures avec un moteur 2 T de G.P?
1° Rallonger les pots de détentes à la sortie des cylindres, (sur un TZ 40mm = -1500 t.m), pour avoir couple et puissance maxi à plus bas régime, car une moteur double de longévité chaque 7 à 8% de régime en moins.
2° Rétrograder les vitesses à très bas régime régime, un 2t à mélange n'est pas ou peu graissé au rétrogradage.
Bon il y a certainement d'autres trucs dont je ne me souviens pas comme enlever le joint d'embase pour baisser légèrement les diagrammes et creuser d'autant la culasse pour garder le même taux de compression.
Bien sûr la carburation réglée pour la période la plus froide du petit matin et des bougies adéquates."
Suite à cette course, « Pépé » décide de remettre en fabrication une série d’une dizaine de « poutres » supplémentaires.
L’année suivante, Laurent Gomis remplace Jean-Jacques Coq et on recommence.
Cette fois la cylindrée est portée à 400cc.
Le moteur est constiué d'un bas-moteur de 400 RD, une boîte de vitesses de TZ, un embrayage à sec pour TZ.
Des cylindres de 350 TZ sont utilisés mais comme le 400 a une course plus longue, Eric fait souder des plaques en aluminium pour en augmenter la hauteur et reprend les lumières avant de faire projeter du molybdène à la place du chrome.
La fourche est remplacée par un système tubulaire à bras tirés, précurseur de ce que l’on verra sur les célèbres productions de « Pépé » trois années plus tard…
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Un des nombreux brevets Offenstadt
Le moteur n'a pas été essayé avant les essais et durant la première séance, le moteur se révèle "un boulet" puisque Eric ne se fait pas décrocher par les Honda officielles en ligne dorite.
En courbe, ils les passe facilement...
Tout se présente donc pour le mieux.
Hélas, le moteur est détruit par un manque d’huile dès la deuxième séance d'essais (et remplacé par un « poussif » moteur de série) tandis que la fourche expérimentale posera quelques soucis de tenue de route durant la course.
Aujourd’hui, sur l’excellent site Bike70.com, François Gomis, frère du coéquipier de Pépé et essayeur à
Moto Journal, narre, non sans humour : «Après différentes tentatives infructueuses de réglage de l'avant sur les premières heures de course, « Offen » avait donc décidé d'arrêter la
moto, de sortir la fourche et - alors là, lisez bien - de diminuer l'épaisseur des rondelles de calage qu'il y avait un peu partout dans la fourche À LA TOILE ÉMERI (à chanter sur l'air de « Ah, ah, ah la queue leu leu » ! Me voyant les mains dans les poches, Offen m'avait embauché illico avec un contrat OAD (Offen A Dit), l'ancêtre du CDD. Et nous voilà tous en train de frotter chacun sa rondelle en acier dur pour gratter un petit dixième de millimètre. La toile émeri étant à l'abrasif ce qu'est le triangle à l'orchestre, le travail se faisait en finesse mais surtout lentement. Je vous remets en mémoire qu'il est deux heures du matin, que nous sommes au Bol d'Or et non à l'atelier une semaine avant la course. Des mécaniciens d'autres écuries vinrent d'ailleurs nous voir un tantinet goguenards. Certaines réflexions fusèrent même, style : " Vous serez prêts pour le départ? ", ou encore " Ca sera fini pour l'arrivée ?"
Cette anecdote (extraite de l’excellent site Bike70.com) en dit long sur le concepteur de la machine ; quand il a une idée, il faut la réaliser, et tout de suite !
Et des idées, il en a des milliers…
Toujours en 1976, Pépé s'aligne aux 24 heures de Montjuich, avec Laurent Gomis, sans grand succès.
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]En 1977, Katayama essaie la version endurance de la "poutre".
Autre poutre chez Scrab ( ? à creuser)
[Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]Laurent Gomis sur une Smac Morbidelli en 1978 (pas plus d'info!)
Poutre 4-temps (à creuser mais apparemment, peut-être seulement 2 d’époques : BPR ou BRP pour la course de côte)
Le plus incongru : une « poutre » a été alignée au départ du rallye Paris-Dakar!
Il fallait vraiment ne douter de rien et la colonne de direction, montée sur de très fins roulements à plat, n’a pas résisté bien longtemps…
Aujourd’hui, certaines de ces poutres sont stockées au fond de granges tandis que d’autres sont encore utilisées !
De temps en emps, on voit une en annonce, le plus souvent équipée de jantes SMAC également, pour 5000 euros.
L’aventure des « poutres » ne s’arrête cependant pas tout à fait là…
A suivre…