[Oldies] [Vidéos] Mike Hailwood, retour à Mallory Park

Pour tous ceux qui n'ont jamais vu Hailwood en piste, ce nom reste une légende, l'homme qui a remporté le premier trois TT dans la même semaine, l'homme qui a remporté le titre mondial 250 sur une Honda privée, l'homme qui a remporté ensuite quatre titres consécutifs en 500 pour MV Agusta, puis quatre autres en 250 et 350 pour Honda, ne manquant que d'un souffle deux autres titres 500 avec Honda en 66 et 67, remportant au passage jusqu'à trois courses le même dimanche (250-350-500).

Pour ceux de ma génération, ces exploits sont uniquement sur du papier, des photos en noir et blanc, et n'ayant vécu aucune course de cette époque, on peut toujours se demander si ces titres et ces victoires sont probants. (bon vous aurez compris que ce n'est pas mon cas, la bio d'Hailwood est le premier bouquin moto que j'ai acheté)

Sympa, Mike a eu la bonne idée en 1978, à 38 ans, 11 ans après avoir cessé de participer aux GP, de revenir de Nouvelle Zélande où il avait pris sa retraite pour disputer quelques courses, dont bien entendu le fameux TT de l'Ile de Man, remporté en catégorie TTF1 sur Ducati face à la Honda officielle de Phil Read.

Vous me direz que le TT est à part, une course où la connaissance du tracé est plus importante que la vitesse pure, comme d'ailleurs son palmarès le prouve, et donc qu'on peut rester dubitatif sur le niveau réel de Hailwood.

Fort heureusement, je viens de regarder une vidéo extraordinaire sur Facebook, à propos d'une course disputée par Hailwood, toujours sur sa Ducati, à Mallory Park, dans le championnat TTF1 1978. Il y avait là la crème des pilotes Britanniques de l'époque, notamment Phil Read sur sa Honda officielle, John Cowie sur une Kawasaki ultra rapide, John Williams, Asa Moyce, Chas Mortimer, Barry Ditchburn... Seul manquait Ron Haslam, blessé aux essais.

En regardant cette vidéo, on comprend pourquoi Hailwood est une légende de la moto.
Ne manquez pas ce document, regardez comment Hailwood remonte sur les hommes de tête, regardez sa vitesse de passage en virages, ses freinages, regardez comment et où il double le leader... le tout en ne donnant pas une seconde l'impression d'attaquer, d'être à la limite, on dirait qu'il fait sa balade du dimanche sur les petites routes anglaises. Epoustouflant !

https://www.facebook.com/photo.php?v=3257034066044&set=o.290557640967627&type=2&theater

J'espère que ce lien fonctionne, la vidéo est vraiment exceptionnelle.

Un document exceptionnel !!!

Woaw merci ! rien à envier aux courses superbikes d'aujourd'hui... Au fait c'est quoi cette Kawa qui tient tête à Mike ? Une grosse quatre cylindres mais quoi ? j'ai cessé de m'intéresser aux japonaises après mon mono 125 CBS... [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

JSB a écrit:

Woaw merci ! rien à envier aux courses superbikes d'aujourd'hui... Au fait c'est quoi cette Kawa qui tient tête à Mike ? Une grosse quatre cylindres mais quoi ? j'ai cessé de m'intéresser aux japonaises après mon mono 125 CBS... [Vous devez être inscrit et connecté pour voir cette image]

La voilà : http://www.realclassic.co.uk/pmkawasaki07032900.html

Génial !!!
Merci Jarno !

Fantastique !!!

Purée, quel freinage pour le "race-winning overtake" ! Et quelle pureté de style, parfaitement en ligne, à l'ancienne, koi.

Et l'exter avant le freinage, monstrueux !

Belle course du champion de légende, merci.
Hailwood reste l'image la plus forte à mon esprit, pas forcément la même que pour Jarno.
De notre admiration commune, j’apporterai les nuances qui tiennent à nos vécus, à nos différences d'âge.
J'ai vu 2 fois Hailwood sur les mythiques Honda 250 6 cylindres et la terrible 500, à la fin d'un âge d'or des GP.
Pour le spectateur de l'époque, le mythe vivant résultait du charisme du personnage construit au long de sa carrière, de sa bravoure jamais démentie, les orteils sanguinolents, de son style déhanché nouveau, de ses déclarations, de sa façon d'être dans une époque souvent tragique.
Bâtie sur cette légitimité, l'ensemble Hailwood + Honda constituait pour longtemps une référence esthétique figée dans les photos de François Beau, placardées sur les murs de nos chambres, imitée sur nos Cromwell.
Ce charisme, il le confirmera encore plus tard sur 4 roues.
Bubu l'a éprouvé de près et en a joliment témoigné.
Le comparaison est douloureuse pour beaucoup de pilotes / produits actuels.

Les "nouvelles" catégories super biques n'avaient plus le prestige de la période précédente et de son pilote dont elle ne dévalorise pas les prestations. Les mythes ne se laissent pas pervertir dans les crânes.
Mais ce que c'était chouette, les courses en Angleterre, si mornes sur le continent !
Merci Jarno pour la vidéo, c'est superbe !

Mais Hailwood, pour ma génération, c'est çà :

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Merci pour ce document extraordinaire.
Tout ça à 38 balais sans avoir plus rien à prouver.....
Écœurant pour les adversaires sans aucun doute.

Merci Jarno, joli cadeau de Noel et de fin du monde
je viens de comprendre ce que j'avais perdu à ne pas l'avoir vu ni en vrai ni en vidéo !
A propos vous connaissez l'interview à la TV française archive INA, je n'ai pu le trouver qu'ici sur PL ?

pour cette vidéo.
J'ai l'âge nécessaire pour avoir vu le Grand Mike en live ... mais ça ne s'est pas fait.
Uniquement journaux et vidéos, mais il reste le premier (à jamais) à m'avoir fait rêver de motos et de courses.

Ci-dessous, le lien vers le reportage du magazine "les coulisses de l'exploit", cité par Gilles_à_Paris.

http://www.ina.fr/sport/auto-moto/video/CPF04006488/mike-hailwood.fr.html

En tout cas la Kawasaki de John Cowie, préparée par Peckett & McNab, elle pédale fort !
C'est bien simple, on dirait la Suter de Marquez en Moto2 cette année !


Et puis je suis heureux d'avoir entendu pour la première fois de ma vie l'expression "cool as a cucumber" utilisée par le commentateur pour parler d'Hailwood...





L'effondrement de Read dès que Hailwood le passe dans cette course me donne envie d'un hors sujet pour préciser le contexte de ces post-TT races de Mallory Park.

Phil Read est né dans une famille modeste, et il a disputé ses premières courses à la fin des années 50, tout comme un certain Stanley Michael Bailey Hailwood, fils de milliardaire. Et c'est ce dernier qui signera les premiers exploits, remportant course sur course, devenant le plus jeune vainqueur d'un GP, puis remportant son premier titre mondial en 1961, tandis que Read parvient tout juste à débuter en GP. Toujours en 1961, Hailwood remporte le TT 125, le TT 250, le Senior TT, et il est en tête du Junior TT avec sa 350 AJS avec 2 minutes d'avance, quand un maneton casse en vue de l'arrivée, laissant... Phil Read remporter son premier TT.

Read devient en 1964 pilote officiel Yamaha, et sa RD56 lui permet de devenir champion du Monde 250 en 1964 et 1965, tandis que Hailwood empile les titres 500cc, beaucoup plus prestigieux. Pire, Hailwood, las de ses victoires sans adversaires en 500 décide de passer chez Honda pour disputer les championnats 250 et 350, tandis que Redman, champion 350 4 ans de suite, sera affecté à faire débuter la nouvelle Honda 500.

Et en 250, dès 1966, Hailwood écrabouille ce pauvre Read, double champion du titre, en remportant 10 des 12 GP disputés !
Read se défendra mieux en 67, marquant autant de points que son rival mais il perdra quand même le titre, au nombre de victoires. Et en parallèle, Hailwood se couvre de gloire en remportant les 350 aussi, et en manquant de justesse les titres 500.

Et au TT67 Hailwood est magique, remportant les 250, les 350 et les 500 en établissant à chaque fois un nouveau record du tour, et celui des 500 tiendra la bagatelle de 8 ans ! Une fois de plus Read n'a que les miettes, remportant les 125 sans battre le record du tour établi par Ivy en 66...

Phil Read a bénéficié de la retraite de Mike-the-Bike fin 67 pour devenir enfin le meilleur pilote britannique en GP :
champion du Monde 125 et 250 en 1968,
champion du Monde 250 en 1971,
champion du Monde 500 en 73 et 74.

Puis il quitte brutalement les GP en cours de saison 1976 (dans des conditions tragi-comiques), mais il fait en 1977 un retour magnifique au TT, lui qui avait boycotté l'épreuve depuis 1972, remportant la catégorie TTF1 sur une Honda officielle* et le Senior TT sur une Suzuki RG500 compé-client.

Bref, depuis 1967, Read est incontestablement une légende vivante du sport moto britannique, et même si Barry Sheene lui fait de l'ombre depuis ses titres 500 de 1976 et 1977, Read s'est refait une célébrité en Angleterre avec ses succès au TT.

Donc quand Mike Hailwood annonce son retour, Read voit revenir son pire cauchemar.
La course TTF1 sur l'Ile de Man sera terrible pour Read, parti devant son rival : Hailwood réalise au premier tour, départ arrêté, son meilleur tour jamais réalisé sur le Mountain Course, et il finit ce premier tour déjà en tête au chrono devant Read.
Humiliation suprême, Hailwood va jusqu'à rattraper et doubler son concurrent, Read abandonnant peu après s'être fait dépasser, sur problème moteur.

Read affirmera que sa Honda usine était poussive et ne pouvait pas lutter contre la Ducati de Hailwood, mais il ne fait qu'un doute que les hurlements de joie du public au passage d'Hailwood ont du terriblement lui miner le moral, 20 ans après leurs débuts, lui qui une fois de plus tombait dans l'ombre de son rival.

Donc, à Mallory Park, Read peut encore penser que, sur un vrai circuit, il va se venger.
Il prend vite la tête, mais ne peut empêcher Cowie et son bolide de le doubler, ni surtout Hailwood de passer aussi.
Et là regardez la vidéo, Read s'effondre instantanément...

Rappelons que, comme pour enfoncer le clou, Hailwood remportera le Senior TT en 1979 sur une Suzuki RG500, établissant un nouveau record du tour qui tiendra trois ans et un nouveau record de l'épreuve qui tiendra 4 ans...

Les 20 ans de rivalité entre ces deux hommes me font penser à la rivalité entre Biaggi et Rossi, avec pour trait commun supplémentaire l'amour inconditionnel du public pour Hailwood et Rossi, et une personnalité plus sombre et controversée pour Read et pour Biaggi...


*C'est le fameux 8ème titre mondial dont se prévaut Read, car la FIM, pour compenser en quelque sorte l'affront fait au TT en lui faisant perdre son statut de manche britannique du championnat du Monde, a attribué à la course TTF1 l'appellation de championnat du monde...

Superbe mise en perspective, chapeau l'artiste

Très bonne analyse me semble t-il.. merci Jarno !

il y en a (Marc, Jarno,...) qui auraient pu, s'ils avaient réussi dans la vie, devenir journaliste moto...
Mais on a la trajectoire que l'on peut, comme disait Phil se faisant doubler par Mike

Gilles_a_paris a écrit:

il y en a (Marc, Jarno,...) qui auraient pu, s'ils avaient réussi dans la vie, devenir journaliste moto...

Hé, j'avais une LIP à 20 ans!

j'adore tes rétrospectives

Gilles_a_paris a écrit:

A propos vous connaissez l'interview à la TV française archive INA, je n'ai pu le trouver qu'ici sur PL ?

Oui, voici le lien :http: http://www.ina.fr/playlist/medias/moto.306404.CPF04006488.non.fr.html#containerVideo


dans la play-liste "moto" de L'INA:

Très beau raffraîchissement historique

En voyant l'accélération de folie de la Kawa à la sortie du droite autour du lac, j'ai aussi pensé à la Honda Monlau Spéciale de MM. Quant à Read qui tourne la tête un peu nerveusement après quelques tours, on peut imaginer pourquoi à la lumière de ces éclaircissements.

PS: Tiens, mon 900ème message à l'occasion d'un sujet sur Mike The Bike. C'est cool (comme un concombre).

Houla Jarno!...Si je partage l'enthousiasme general sur la forme de ton resumé,fort bien troussé, de la confrontation de la carriere des deux pilotes,je suis un peu plus mesuré sur le fond...Apres tout un forum c'est fait pour ca!...
"Hailwood se consacrant au championnat 500,bien plus prestigieux...." Heu!..on parle bien de la meme chose?....Quand le second finissait a quasi un tour derriere la MV,et s'appelait Jacky Ahearn,Alan Sheperd,Derek Minter....Tous sur des monos anglais?....Hailwood s'y emmerdait tellement qu'en 1965 il a commencé a rouler en Formule 1 entre les GP moto!......Et si Honda ne lui avait pas proposé un contrat pour 1966 il aurait disparu des ecrans radars GP moto fin 65.....Il n' y avait aucun prestige a remporter un titre 500 dans ces années la....
Meme si Hailwood etait un immense pilote quand Honda s'est pointé dans le championnat 350 en 1962,MV a preferé se retirer a la fin de la saison malgré le fait d'avoir Hailwood.....En 1962 Redman sur la Honda a plié le championnat..
La victoire d'Hailwood au TT 1967 avec le record..parlons en....Ago avait course gagnée sur la MV 3 quand sa chaine a cassé....
Les titres en 500 de Sheene qui ont porté ombrage a Read,en 76 et 77....Sheene etait pilote d'usine Suzuki et Read roulait sur une 500 RG client aux couleurs de "Life"....Je me souviens en 76 d'un incroyable Grand prix d'Italie ou Read dispute jusque sur la ligne d'arrivée la victoire a Sheene....Il a arreté a Spa,en se rendant compte qu'on ne gagne pas avec une RG privée contre une officielle......
Tout ca pour dire que notre passion nous fait quelquefois exprimer un ressenti pas toujours objectif..C'est sur que pour Hailwood qui avait un papa qui traitait directement avec Soichiro Honda pour avoir la meilleure machine ,des ses debuts,les choses ont du etre plus facile.....Pour comparer objectivement deux pilotes il est bon de les voir rouler au sein d'un meme championnat et la ,la confrontation Read- Hailwood est beaucoup plus equilibrée...Les saisons 1966 et 1967 revelent bien cela..Un coup toi ,un coup moi....Hailwood ne roulait pas "le coude a la portiere",loin s'en faut.....
Pour revenir a cette vidéo,la course d'Hailwood est epoustouflante....Bon,l'année de son retour il y en eut d'autres en Angleterre ou,de memoire il finit 5eme...6eme....
Ce qui reste dans l'imaginaire collectif surtout pour Haiwood ,que peu d'entre nous ont vu rouler (moi le premier malheureusement)...Rouen 65 il etait pas la.....C'est un charisme indefinissable,un coté cool,une aisance ,assez incroyables....Un courage physique aussi (decoré pour cela)...Bref,une aura....En face un Read mal compris,des declarations quelquefois bien "barrées" a mettre sur le compte d'une timidité,d'un complexe qui n'a rien a voir avec les origines sociales (Read n'avait pas une "extraction" a la Hailwood,mais ce n'etait pas un fils de prolo non plus..)...et un cynisme total,souvent mal percu...Le gars avec lequel on n'a pas forcement envie de partir en vacances.....a tort je pense....Mais dans l'esprit du public,il n'y avait pas photo.....J'aimerais bien savoir ce que Bubu en pense ,lui qui a connu et frequenté les deux....Quand a departager le meilleur pilote , c'est totalement idiot,bien sur.....Je tenais a moduler l'article de Jarno car j'ai eu un peu mal au"Read" avec ce costard hivernal....
Mon pseudo pourrait laissez penser a un manque d'objectivité?....Que nenni!...Voici une photo partielle de mon bureau...;Qu'y voyez vous ?....Le grand Mike!...Partout!!!!

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Mike after he finished this particular race

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Pierre,

Je comprends tes arguments et je te remercie de les poster de façon aussi mesurée.
Je vais tâcher de te répondre objectivement et avec mesure, moi aussi :

- La catégorie 500, de 62 à 65, restait la catégorie reine, quand bien même les bagarres étaient plus vives dans les autres catégories. Et pendant toutes ces années, Hailwood roulera plus vite que les 250 et 350. Il n'y avait peut-être pas de mérite à gagner, mais du prestige, si. Les 500 restaient les 500, les motos les plus rapides du monde à cette époque ; en 64 Hailwood profitera de sa venue à Daytona pour le GP des USA, pour battre 6 records mondiaux avant le GP, dont celui de l'heure.

Je n'ai jamais lu nulle part que Hailwood envisageait sa retraite fin 65. Au contraire, il a abandonné en cours de saison son premier début de carrière en F1 pour se reconcentrer sur la moto. Il a constaté toute l'année le favoritisme dont bénéficiait son nouveau coéquipier Agostini, le pompon étant à l'occasion du GP de Finlande, où MV lui a carrément dit qu'il n'avait pas à y aller parce que l'usine ne ferait pas le déplacement, pour y envoyer en fait Ago et ses MV, qui pouvaient encore battre Hailwood pour le titre 500. C'est là que Hailwood s'est mis à discuter avec Honda, lassé de ces magouilles à l'italienne et désireux de participer aux formidables bagarres Honda-Yamaha des moyennes cylindrées.

- le TT67 tu oublies juste que la Honda ne tenait absolument pas la route et en plus la MV avait la meilleure vitesse de pointe aux essais, ce qu'on oublie aussi trop facilement en tenant pour acquis que la Honda avait un meilleur moteur.

Et la course n'était pas du tout gagnée ni dominée par l'Italien au moment de son abandon, ça c'est une légende.

Ago a été le plus rapide au premier tour, établissant un nouveau record et terminant 11 secondes devant Hailwood, qui était devant lui sur le parcours, mais ce dernier attaqua plus fort dans les second et troisième tours, établissant au passage ce fameux record qui durera 8 ans. Au ravitaillement à la fin du 3ème tour, Hailwood n'avait plus que deux secondes de retard sur Ago, mais on comprit son problème : la poignée des gaz n'était plus fixée sur le guidon, sans doute une conséquence des multiples ruades et guidonnages infligés par la Honda et Mike devait la maintenir en place tout en pilotant. Il perdit du temps à essayer de remettre en place cette fichue poignée, en vain, et il reprit la course avec plus de 15" de retard sur Ago, et une poignée toujours baladeuse. Malgré ça, Hailwood remonta à nouveau et, au pointage de Ramsey dans le 5ème tour, il avait pris la tête d'une seconde. A Bungalow, Ago était repassé en tête, de 2"5. C'est à ce moment, alors qu'Hailwood passait la ligne pour commencer son dernier tour, qu'Ago dut s'arrêter, chaîne cassée, dans la montagne.

Tu vois bien qu'affirmer qu'Ago avait course gagnée est très exagéré... Certes, Hailwood a dit très poliment ensuite qu'il ne pensait pas qu'il aurait pu gagner à la régulière, mais nous savons tous qu'il n'aurait rien lâché jusqu'à la ligne d'arrivée, et que tout peut arriver sur les 60km d'un dernier tour du Mountain Course.

- Oui les titres de Sheene ont porté ombrage à Read : je ne dis pas qu'il n'y avait pas des raisons pour que Sheene batte Read, je dis juste que dans l'esprit du public Anglais il y avait un nouveau héros : dès 74-75, avec sa nonchalance, sa jeunesse, son dramatique accident de Daytona, son retour victorieux à Assen, Sheene a captivé le public, plus que Read, le méchant qui avait trahi Ivy, et en 76 les victoires de Sheene, certes facilitées par son matériel, ont rejeté Read dans l'ombre : il lui a porté ombrage.

- 66-67, la confrontation entre Read sur la Yamaha double championne du monde et Hailwood sur la Honda, il y a deux époques qu'on ne peut pas mélanger :

en 66, comme je l'écrivais, Hailwood a écrasé Read, ce n'est pas du tout un coup à toi un coup à moi comme tu l'écris : Hailwood a remporté rien moins que les 9 premiers GP de l'année, pendant que Read scorait en tout et pour tout 5 podiums. Mais sans doute que la Honda-6, apparue en 65, était plus au point que la nouvelle Yamaha-4.

En 67, le résultat semble plus équilibré sur le papier, mais la saison a été gâchée par les abandons et les problèmes techniques pour les deux pilotes, et Hailwood a abandonné de surcroît dans les 2 premiers GP sur crevaison.

Avant le GP du Japon, dernier de la saison Read a 56 points en brut et 50 en net, comme Hailwood, mais ce dernier compte une victoire de plus, donc Suzuka doit être le juge de paix entre les deux hommes, et on s'attend à un duel homérique. Le duel tant attendu tournera court : Hasegawa (Yamaha) part en tête, suivi de Hailwood. Read est lâché, puis cassera son vilebrequin au 6ème tour, perdant ainsi le titre, tandis que Hailwood doit abandonner peu après, magneto cassée ; ce double abandon illustre bien cette saison bizarre.

- Stan Hailwood traitant avec Soichiro Honda pour avoir la meilleure machine, c'est exagéré, et ça n'explique pas tout.
En vue de la saison 61, Stan Hailwood négocia en effet avec Honda, grâce à la puissance commerciale de ses magasins, le prêt d'une 250-4 cylindres d'usine. Mais Mike n'était pas pilote officiel, il était pilote privé, exactement comme John Hartle ou Bob McIntyre, autres pilotes bénéficiant du prêt de Honda officielles cette année-là. Toutes les Honda-4 étaient identiques en début de saison, mais les machines officielles marchaient de mieux en mieux à mesure des courses, alors que les machines "satellite" comme on dirait maintenant, se dégradaient avec l'usure. Pourtant, c'est bien Hailwood qui remporta le titre mondial.

Et la preuve qu'il n'y avait aucun favoritisme pour Hailwood, c'est qu'en Suède, Honda engagea encore un pilote officiel de plus, Luigi Taveri, aux côtés de Tom Phillis et Kunimitsu Takahashi, pour aider Redman à battre Hailwood, aucun autre pilote ne pouvant plus jouer le titre. Redman partit en tête, mais Hailwood se dégagea des autres pilotes Honda, et remporta le GP devant Taveri, Takahashi, Redman, Stastny (Jawa) et Phillis, décrochant le titre à 21 ans à la barbe des pilotes officiels.

Autre anecdote intéressante, en vue du TT61, Honda avait promis à Stan Hailwood de lui prêter une 125 usine, en plus de la 250. Mais pendant la semaine des essais, Honda dit que finalement ils avaient besoin de toutes les motos présentes pour les pilotes officiels, et qu'il n'y en aurait pas pour Mike. A la veille de la dernière séance d'essais, malgré l'insistance de Stan, Honda restait inflexible. Finalement, tard dans la journée, Honda autorisa Stan à utiliser le mulet de Luigi Taveri, disant qu'elle était en piteux état et ne tiendrait peut être pas la course. Le soir même, Mike fait un tour sur la route avec la moto, et revint en disant qu'elle faisait des bruits mécaniques effrayants. Les mécanos de l'Ecurie Sportive firent leur possible pour atténuer ça, réglant et révisant ce qui pouvait l'être dans la nuit. Ayant entendu que les pilotes officiels avaient des problèmes de température d'huile, Stan fit découper dans le carénage une ouverture en T, dont il avait vu la forme sur des avions, pour mieux refroidir le moteur. Eh bien avec ce mulet, Hailwood talonna Bob McIntyre et sa Honda officielle, et remporta la course quand McIntyre dut abandonner, pression d'huile à zéro. Hailwood précédait rien moins que Luigi Taveri, Tom Phillis, Jim Redman et Shimazaki, tous pilotes d'usine Honda...

Et la dernière preuve, c'est que Honda ne fit aucune proposition à Hailwood pour 1962 ! Ils ont très mal pris que ce pilote privé se permette de battre les pilotes officiels.

C'est le Comte Agusta, impressionné par Mike, qui lui proposé de rouler sur des 350 et 500 MV au GP des Nations 1961 à Monza.
Et Mike peut accepter, puisqu'il est pilote privé !
Hailwood termine ce GP des Nations 2ème en 250 derrière Redman (et devant Phillis), 2ème encore en 350 derrière Hocking, et en 500 il gagne après la chute de Gary Hocking ! MV signera aussitôt Hailwood pour la saison 1962.


Voilà, aussi factuellement que possible, ce qui me fait estimer qu'il y avait une différence sensible de niveau entre Hailwood et Read. Amicalement

Bonsoir,

Ca fait du bien de lire tout ca... Moi, a l'epoque, coinse a Belfort, je me contentais de lire MR... Quand on pouvait l'acheter, rien de garanti avec les distributeurs...

Ce qui fait que, si j'ai de l'admiration pour tous ces gusses, je ne confond pas avec deification/adoration plus oeilleres...

Deja, les petits m'interressaient plus que les gros et l'absense ou non de sponsors/mecene jouait aussi...

Ce qui fait que tous ces debats "c'est lui le meilleur" ne m'affolent pas trop, c'est un peu comme la musique...

Veridique: "C'est qui le meilleur groupe?"... Kiss... Le 2eme?... Kiss etc... "et combien de disques tu as?"

"4, Kiss 1, Kiss 2, Kiss 3 et Kiss 4"

Donc j'avais pas vraiment de preferences dans ma jeunesse...

Depuis, ca a change... Je me suis tape la lecture des pages de Phil Read dans Classic Bike, il faut les avoir lues ces chroniques pour comprendre le gus... Meme le neant c'est mieux a mon humble avis... La meilleure a du etre celle ou il parlait de Ivy et de lui meme... Ca a du faire des vagues quand le courrier des lecteurs est arrive la semaine d'apres...

Patrick

thefrenchowl a écrit:

.....Depuis, ca a change... Je me suis tape la lecture des pages de Phil Read dans Classic Bike, il faut les avoir lues ces chroniques pour comprendre le gus... Meme le neant c'est mieux a mon humble avis... La meilleure a du etre celle ou il parlait de Ivy et de lui meme... Ca a du faire des vagues quand le courrier des lecteurs est arrive la semaine d'apres...

Patrick

Aurais-tu les références des numéros concernés, ou même mieux, un petit scan ?
Mais bon, ça je sais que c'est pô bien !

Comme quoi, une vidéo " anodine " au départ, peut rallumer la flamme de la passion, plus de trente ans plus tard !

C'est beau ce que génère ce sport " d'homme ".

Pour ma part j'admire les deux, qui ont su à leur époque, aller vite, gagner, ne jamais se blesser gravement, et rester en vie