Vendredi 25 août 2017. J’arrive sur le circuit de Nogaro pour assister à la dernière manche du Promosport.
Ce ne sera pas un week-end de course ordinaire. En effet, Alex, joue le titre. Jamais je n’aurais cru ça possible en début d’année. Je me doutais qu’il parviendrait rapidement à comprendre le fonctionnement d’une 1000, mais sa vitesse d’apprentissage a largement dépassé mes espoirs les plus fous.
Sa première position avec 17 points d’avance est inespérée mais, maintenant qu’il est en tête, mon souhait le plus cher est qu’il arrive à contenir les assauts de son redoutable concurrent, Nicolas Souchon.
Il va falloir se battre d’autant que le nombre moins important de concurrents permet d’organiser deux finales, donc un nombre de points à distribuer plus élevé (53 au lieu de 32 avec le système des demi-finales).
Cerise sur le gâteau, Benjamin Vaucher est également aux portes du titre. Benji, je l’ai rencontré en 2014, lors de la première saison d’Alex en 600. Il débutait en 500 avec son frère ainé, Baptiste. Pour le décrire, je dirais qu’il était « explosif », un tempérament de feu qui donnait des sueurs froides à son entourage.
Des moments inoubliables avec des belles performances mais aussi des chutes un peu trop souvent répétées. Or, cette année, il a réussi à canaliser toute son énergie et a réalisé une saison remarquable débutée en fanfare avec un départ en 15ième position à Lédenon et une remontée fantastique jusqu’à taxer le pilote en tête dans le dernier tour. Depuis, il a montré une régularité impressionnante ce qui lui permet d’arriver ici avec 28 points d’avance sur Sanchez.
J’arrive en fin de journée et l’ambiance est détendue malgré l’enjeu.
Une petite séance photos pour commencer. La moto d'Alex a eu droit à une décoration spéciale de Hot Cover pour cette dernière épreuve %C2%A0:]https://www.facebook.com/HotCover64/photos/pcb.1817383508275288/1817376858275953/?type=3&theater :[/url]
Après une soirée sympathique autour d’une succulente paella concoctée par le copain Michel, je passe une nuit paisible en rêvant d’un dénouement heureux.
Je me lève de bonne heure pour assister à la séance d’essais qualificatifs des 600. Je veux voir ce que va faire Ludovic Rizza qui a eu une saison chaotique et qui désire certainement terminer sur une note positive. Il termine 3ième derrière Fitte et Pot déjà titré.
A 9H30, je rejoins Alex dans son box. Il se prépare calmement. Dom démarre la moto. Je le vois faire les toutes dernières vérifications, habitudes de ces longues années dans la compétition moto. Rigoureux jusqu’au bout des ongles, l’ami Dom. Alex a de la chance de l’avoir dans son équipe, d’autant que côté chaleur humaine, il ne lui manque rien.
Je ressens un peu plus de solennité dans les préparatifs. L’enjeu est de taille.
Sur la pré-grille, j’observe Nicolas Souchon ; la tension se lit sur son visage et, en même temps une profonde détermination. Il sait qu’il n’a pas le choix ; il doit réaliser carton plein aujourd’hui pour pouvoir être titré et espérer un faux pas d’Alex.
Ce dernier m’étonne par son calme. Il ne semble pas subir la pression.
Très vite, Nicolas Souchon se trouve en haut de la feuille des temps avec un superbe chrono de 130.432. Il relègue le second, Billy Cornut à plus de 8 dixièmes. Alex est 4ième à un peu plus d’une seconde. Montessuit est devant lui.
Les quatre s’arrêtent très vite. Ils n’ont parcouru que deux ou trois tours. Inutile d’user les pneus. Seul Mageot qui avait obtenu une belle victoire ici l’an dernier insiste mais en vain. Cette année, il est moins performant (9ième temps). Quentin Levrier, qui court dans l’équipe d’Alex réalise un très beau 7ième temps compte tenu du peu de courses auxquelles il participe.
Dans le box Cottard, il y a Olivier Ulmann qui court en Séniors. Cela me rappelle quelques souvenirs quand je suivais les courses chaque semaine dans Moto Journal. Il termine sa séance d’essais tout joyeux après avoir réalisé le 2ième temps à 19 centièmes du 1er.
C’est au tour des 500. Benji est très propre lors de ses tours chrono. Cela me rassure, cela démontre qu’il reste calme sans chercher à tout donner.
Et il finit à une excellente 3ième place, ce qui lui permet de partir devant. Baptiste est content, avec une belle 7ième place. Je retrouve Benji aux box. Il a peu tourné, a failli reprendre la piste mais a su se retenir. C’était pour moi la meilleure option, laisser les concurrents se battre pour la pole position et leur montrer qu’il était là, tout près, sans forcer outre mesure. Je le trouve serein et cela me rassure pour la course.
Je vois Alain Cottard faire les comptes en cas de victoire de Souchon aux deux courses. Dom qui commence à bien connaitre son poulain lui dit qu’Alex ne se polarise jamais sur les essais mais qu’il peut exploser en course. Et que la victoire de Souchon n’est peut-être pas aussi sure que son chrono voudrait le signifier. Puisse-t-il dire vrai !
Première course de l’après-midi, tout au moins première des courses auxquelles j’arrive à m’intéresser ce week-end, les 600.
Je vais m’installer en bout de circuit d’où je peux suivre une bonne partie de la course.
Ludovic fait un bon départ en tête mais est passé par Pot au freinage en bout de ligne droite.
2ième tour. Il est passé par Fitte dans le gauche qui suit la ligne droite des stands.
3ième tour. Pot et Fitte semblent vouloir partir seuls devant. Nagorski se rapproche de Ludovic Rizza.
4ième tour. Fitte est en tête. Mince ! Ludo fait un high-side à la sorte du droite de l’escargot, la moto s’envole, le réservoir est arraché et Ludo est malmené. Je suis inquiet car je le vois se relever en se tenant le bras. Je crains une blessure mais il relève lui-même sa moto.
5ième tour. Pot et Fitte sont détachés devant, mais ils ne passent plus au 6ième tour. Ce sont donc Pape et Nagorski qui se retrouvent aux avant-postes après l’abandon des trois premiers.
Jusqu’au 9ième tour, Pape arrive à contenir Nagorski .
10ième tour. Nagorski passe à l’entrée du gauche après la ligne droite de stands.
11ième tour. Pape n’est plus que 3ième derrière Trueb et Nagorski a une confortable avance qu’il conserve au tour suivant (2 secondes environ).
13ième tour. Pape est tout près de Trueb.
Les positions restent inchangées lors des trois derniers tours et Nagorski marque les 25 points de la victoire qui signifient une deuxième place au championnat car il avait sept points d’avance sur Fitte avant cette épreuve. Il ne peut plus être rejoint par son concurrent direct.
Après la course, il y a une discussion avec Alain Cottard, toujours aussi passionné qui se projette en 2018. Après Nogaro, le moteur sera démonté et on pourra faire la métrologie. Cette année, la moto est arrivée telle quelle du Japon et elle est entièrement d’origine.
L’année prochaine, elle devrait progresser en performance, même si Alex a montré jusqu’à aujourd’hui qu’elle ne marchait pas trop mal quand même !
Alain prévoit de participer aux 24 heures du Mans et au Bol d’Or. Bref, un vrai accroc à la compétition moto.
C’est le tour des Séniors d’entrer en piste. Je vais suivre la course d’Olivier Ulmann. Il m’a indiqué qu’il avait piloté au Bol d’Or pour mon concessionnaire Philippe Puyo de Tarbes, il y a ….. un certain nombre d’années. Le monde est petit ! C’était au guidon de la mythique Honda RC 45.
Il réalise un bon départ et est 2ième dans le premier tour derrière Neff. Il se maintient dans cette position durant 6 tours.
7ième tour. James Guyon qui me parait très rapide le passe au virage de la ferme.
8ième tour. Bis repetita, c’est le 77, Nacimiento, qui le double au même endroit.
9ième tour. Neff est talonné par Guyon. Fin de course haletante entre les deux. Je vois Guy Bertin, en milieu de peloton. Après avoir écumé les grands prix dans les années 80, il faut qu’il soit sacrément passionné pour venir jouer en catégorie Promosport et devoir tout réapprendre avec des grosses cylindrées, lui le spécialiste des petites 125 deux temps. D’ailleurs, il a un très beau style mais qui ne semble pas adapté au caractère de ces gros quatre cylindres.
11ième tour. Guyon est passé mais Neff n’a pas baissé les bras et reste collé derrière son concurrent. Il le repasse d’ailleurs au 14 ième tour.
Mais dans le dernier tour, Guyon reprend son bien et s’impose pour 16 centièmes de seconde ! Ils n’ont plus vingt ans mais, dans leur tête, c’est tout comme ! Olivier termine 4ième.
17H50, l'heure des 1000.. L’air est surchauffé. Tout à l’heure, il a été décidé de descendre encore un peu la pression du pneu à 1,150.
Tour de chauffe. Je suis tétanisé !
C’est le départ. Comme d’habitude, Alex part devant. C’est devenu sa spécialité cette année. Je comprends qu’il ne se polarise pas sur les essais. Il est suivi par Montessuit et Souchon.
2ième tour. Souchon a pris la tête, suivi par Alex et Montessuit. Puis viennent Cornut, Cramer et Quentin Levrier
.
3ième tour. Souchon s’en va. Il tient un rythme très rapide.
4ième tour. Souchon a déjà environ deux secondes d’avance !
5ième tour. Montessuit fait un bel intérieur à Alex dans le virage de la ferme.
6ième tour. Montessuit semble revenir sur Souchon et Alex est suivi par Cramer.
7ième tour. C’est confirmé, l’avance de Souchon diminue et je sens que Montessuit va revenir sur lui.
8ième tour. Montessuit est maintenant tout près de Souchon et Alex garde à distance Cramer tout en reprenant un peu de temps sur la tête.
9ième tour. Oui, c’est net, Alex revient sur les deux hommes de tête. Allez Alex ! Billy Cornut décroche.
10ième tour. Alex n’est plus très loin de Montessuit.Je le vois se rapprocher de lui dans la ligne droite. Mieux, il tente de lui faire le freinage …. et réussit sa manœuvre. Il est 2ième !
11ième tour. Il remet le couvert et fait les freins à Souchon au bout de la ligne droite. Quel freineur !
Il est en tête. Je m’attendais à une course d’attente, mais c’est un Alex survolté qui parcourt les 5 derniers tours.
Il me fait peur à chaque tour tant il sort fort du virage de la ferme. Il distance Souchon qui se fait remonter par Montessuit au 14ième tour.
15ième tour. Alex a environ 3 secondes d’avance. Tout doux Alex, la victoire est au bout.
Dernier tour. Cramer a passé Souchon et Montessuit se fait pressant. Je le vois d’ailleurs tenter un freinage en bout de ligne droite mais en vain.
Bravo Alex, 4ième victoire ô combien importante.
Pour le championnat, ce n’est pas encore gagné. Il lui, manque un petit point ! Il faudra donc attendre demain en espérant qu’aucun grain de sable ne vienne enrayer cette belle mécanique (casse ou chute ET victoire de Souchon). Je croise les doigts !
En tout cas, Alex a montré qu’il supportait très bien la pression ; en fait, c’est lui qui l’a mise sur son adversaire en augmentant son avance à l’issue d’une course limpide gérée avec beaucoup de maîtrise. Il a pris son rythme et est revenu sur la tête pendant que ses adversaires commençaient à s’essouffler. Bravo !
A peine le temps de me remettre de mes émotions, c’est au tour de Benji de montrer ce qu’il sait faire.
Sanchez part en tête, Benji est 4ième et Baptiste 7ième.
2ième tour. Sanchez semble vouloir s’échapper mais Eruam et Trueb résistent. Benji est bien installé en 4ième position suivi par Aynié et Descours.
3ième tour. Eruam s’est rapproché de Sanchez. Trueb est à une seconde derrière, puis Benji deux secondes plus loin.
5ième tour. Benji est 4ième et n’est pas menacé. C’est bien, il ne prend pas de risques et laisse les trois devant s’expliquer. J’approuve d’autant qu’il y a Eruam dans le groupe et qu’il est parfois très chaud !
7ième tour. Les trois premiers se suivent de près mais sans possibilité d’attaque. C’est rare de voir une course en 500 aussi calme. Baptiste est 8ième derrière Estadieu et devant El Bez.
8ième tour. Trueb baisse un peu de rythme. Benji remonte sur lui. Je me prends à espérer un podium.
9ième tour. Oui ! Il le passe dans la ligne droite.
10ième tour. On annonce le meilleur tour en course pour Benji ! Mais Trueb n’a pas dit son dernier mot et le talonne dans la ligne droite des stands. Baptiste est un solide 8ième.
11ième tour. C’est net, Sanchez s’envole vers la victoire. Eruam a rendu les armes. Attention Benji, Trueb est collé à tes basques dans la ligne droite. Il tente un intérieur mais Benji résiste. Mieux, il remonte sur Eruam dans toute la partie sinueuse du circuit et le passe dans la ligne droite des stands à l’abord du dernier tour. Il garde sa position jusqu’à l’arrivée. Superbe 2ième place!
Comme pour Alex, il va falloir attendre demain pour le résultat final. Il a maintenant 23 points d’avance sur Sanchez.
De retour dans le paddock, je croise Billy Cornut qui m’a semblé moins à l’aise que l’an dernier où il avait gagné par deux fois en 600. Il m’indique qu’il n’arrivait pas à bien passer le dernier virage de l’escargot qui conditionne une bonne vitesse dans la ligne droite, et il a vu s’éloigner ses concurrents devant. Dont Cramer qui s’est rassuré avec cette belle 2ième place après sa lourde chute au Mans.
Quant à Alex, il me dit qu’il a juste gardé un rythme constant du début à la fin. Quelqu’un qui le chronométrait m’indique qu’il était effectivement très régulier, en 1.33.Souchon s’est peut-être fatigué avec un départ tonitruant et un tour sous les 1.31.Seize tours, c’est long, et les pneus peuvent souffrir, les pilotes aussi sous cette chaleur suffocante.
Je vais à la rencontre de Ludo. Il reconnait une petite erreur à la ré-accélération. En discutant avec lui, j’ai réalisé une fois de plus que c’est l’accumulation de détails qui font qu’une course va être réussie ou pas. Là, c’est pour Ludo un panneautage illisible qui ne lui permettait pas de connaitre la position de ses poursuivants. Craignant de se faire doubler à l’intérieur, il a resserré sa trajectoire et a été un peu trop violent sur la remise des gaz. La moto est bien abîmée mais le papa s’attelle à la tâche. Heureusement, Ludo est moins cassé que sa moto ! Il devrait pouvoir repartir demain pour terminer sur une note plus positive.
Proximité de Nogaro oblige, c’est avec un groupe bien plus important que d’habitude que la soirée se déroule autour de délicieux tajines, après la paella de la veille. Merci Philippe !
Quant à Alex, je l’ai vu sortir de sa petite caravane Eriba sapé comme un milord. Il s’en va à une quarantaine de kilomètres de là pour le mariage d’un ami. Je confirme donc qu’il supporte très bien la pression !
Lors de la soirée, Olivier Ulmann fait part de sa colère devant l'absence de filière. Il se souvient qu'il avait été intégré comme remplaçant de l'équipe officielle Kawasaki d'endurance l'année où il se battait pour le titre en 1000 Promosport. Il est vrai qu'Alex n'a aucune idée de son avenir et il n'a pas les moyens financiers de passer en superbike.
J'en profite pour égratigner la presse moto qui se désintéresse totalement du Promosport. Les articles, quand il y en a, ne font que reproduire le compte rendu officiel du site CDF Promosport! A ma connaissance, seul Moto Journal rédige lui-même ses articles, même si c'est succinct: http://www.moto-journal.fr/sport/promosport-1000-a-nogaro-sarrabayrouse-sacre/ .
C'est vraiment dommage, d'autant que j'ai pu constater un très bon niveau des pilotes dans toutes les catégories.
Dimanche, 11H20.
Les 600 entrent en piste.
Pot part en tête suivi par Ludo. Les deux s’échappent dans les premiers tours. Je suis rassuré, la moto de Ludo semble bien fonctionner. Nagorski est 3ième. Je regarde la course de Martin Naussac. Depuis que je suis le Promosport, je fais des rencontres et le pilote et son numéro devient alors une personne bien précise avec qui j’ai pu parler, échanger des idées et, forcément, je regarde sa course de plus près. Il est 12ième. Hier, il avait perdu l’avant dans le double-droit avant l’ancienne ligne droite des stands, là où Fitte et Pot sont tombés, un tour plus tard.
4ième tour. Pot a environ une seconde d’avance sur Ludo qui tient à distance Romain Pape.
Les tours suivants, les positions sont stables. Course un peu monotone avec les 5 premiers qui se suivent.
Mais, Hertzberg reprend peu à peu du temps sur Pape, le 3ième et il finit par le passer au 11ième tour. Martin Naussac effectue aussi une belle remontée et il est 9ième.Puis, il s’attaque à Vincent Ferré devant lui. Il lui fait les freins au 15ième tour.
Dernier tour. Grosse bagarre entre Pape et Hertzberg. Ce dernier double Pape dans la ligne droite mais ce dernier tente de le passer au freinage dans la foulée. Un peu trop optimiste, il élargit. Et je ne le vois pas passer la ligne d’arrivée. Cela profite à Martin Naussac qui termine 7ième à deux doigts de passer Anthony Paul sur la ligne d’arrivée.
Ludo ne revient pas avec sa moto. Elle l’a lâché dans le tour d’honneur ! Sur le podium, il a une expression qui montre à quel point il savoure cette deuxième place. Plus tard, il me raconte sa course. En fait, au démarrage, il a vu que la batterie était faible. Cela ne l’a guère rassuré. Et son inquiétude a augmenté d’un cran quand son tableau de bord a déclaré forfait à 3 tours de l’arrivée. La fin de course lui a paru interminable….
13 heures. C’est la fin du repas. Je sens la pression monter. Je sais qu’Alex et Benji sont aux portes du titre. Je connais aussi les impondérables de la course pour savoir que rien n’est joué d’avance.
Dom fait un sacré compliment à Alex ; venant d’un ancien ayant bourlingué sur les circuits, il n’en a que plus de valeur et il me confirme mon ressenti. Alex a vraiment franchi un palier cette année.
Pour ma part, je n’ai qu’une hâte, c’est que le drapeau à damiers s’abatte. La chaleur est de nouveau là, lourde, peut-être plus que la veille. C’est une donnée à prendre en compte. Ce matin, je me suis rassuré en voyant le bon état des pneus de la moto d’Alex, usés régulièrement.
J’ai écouté Alex discuter avec Patrick Mageot.
Ce qu’il lui a dit est intéressant. Pendant les essais libres, Alex utilise systématiquement des pneus usés. Souchon passe des pneus neufs, ce qui lui permet d’être plus rapide et d’arriver fin prêt aux essais qualificatifs avec une moto dont il connait le comportement à la limite. Et c’est vrai qu’il est très fort dans cet exercice avec un chrono au top dès son premier tour lancé. J’ai pu voir ça à Pau, Alès et ici à Nogaro. Alex reconnait qu’il s’est retrouvé à un mètre du vibreur avec un pneu neuf qu’il découvrait. Mais, pendant les deux courses, il n’est pas surpris par l’usure des pneus dont il connait déjà le comportement et cela lui permet d’être rapide jusqu’au bout.
Je pars m’installer à l’escargot où je retrouve Ben, un copain. Comme je lui dis, il pourra me soutenir au cas où je me trouverais mal ! Il faut dire que suis beaucoup plus stressé qu’Alex, mais c’est une habitude chez moi. Aujourd’hui, c’est juste beaucoup plus intense !
Cela commence avec les 500.
Benjamin est 3ième au premier passage devant nous.
2ième tour. Il est 5ième derrière Eruam, Descours, Trueb et Sanchez.
3ième tour. Les quatre s’en vont devant et je sens que Benji ne va pas forcer. Baptiste est 8ième.
4ième tour. Baptiste s’est dégagé de son groupe et il est 6ième.
6ième tour. Descours a décroché du groupe des 3. Aynié a doublé Baptiste et remonte sur Benji.
7ième tour. Aynié passe Benji au freinage en bout de ligne droite. C’est net, Benji a décidé de ne pas prendre de risques inutiles. Je regarde derrière lui. Il faudrait que les huit pilotes le rattrapent et le doublent. Mission impossible vu les écarts énormes.
8ième tour. C’est au tour d’El Bez de prendre le meilleur sur Baptiste et de remonter sur Benji.
9ième tour. Sanchez s’échappe seul devant. Benji n’est plus que 7ième.
Plus que trois tours. Baptiste dépasse le petit frère. Il parvient à reprendre El Bez et Aynié pour terminer à une belle 5ième place. Benji finit 9ième …. et surtout champion de France.
Je le vois qui s’arrête à la sortie de virage de la ferme. On lui remet un tee-shirt pour fêter son titre. Les deux frères savourent sûrement ce moment et terminent à vitesse réduite le tour d’honneur.
Pas le temps de profiter de ce grand moment. Les 1000 entrent en piste.
Départ. Devinez qui passe en tête devant nous ? Gagné, c’est une nouvelle fois Alex !
2ième tour. Comme lors de la première course, Souchon a pris l’initiative. Il est 1er . Derrière Alex, il y a Cramer, Montessuit et Cornut.
3ième tour. Cramer fait un très bel extérieur à Alex dans le virage de la ferme. Montessuit est derrière talonné par un Billy Cornut chaud bouillant dans l’escargot. Je n’aime pas ça, j’ai vraiment peur de l’accrochage. Heureusement, je vois les deux passer Alex dans le droite en bout de la ligne droite.
4ième tour. Alex est donc 5ième mais il n’y a plus ce risque de contact que je craignais. Laurent Brison est 6ième mais n’est pas menaçant.
5ième tour. Souchon a environ 2 secondes d’avance sur Cramer.
6ième et 7ième tours. Brison remonte doucement sur Alex.
8ième tour. Cramer s’est rapproché de Souchon. Ce dernier résiste à l’assaut dans les deux tours suivants. Billy et Montessuit se tiennent dans un mouchoir.
11ième tour. C’est fait, Cramer est presque au contact. J’ai l’impression qu’il veut jouer la victoire.
Les deux tours suivants, Alex lâche Brison qui a maintenant 3 secondes de retard.
Plus que trois tours, cela commence à sentir bon le titre. Je vois bien qu’Alex ne prend aucun risque.
14ième tour. Première tentative de Cramer sur Souchon en bout de ligne droite mais cela ne passe pas.
15ième tour. Cramer est 1er.
16ième tour. Souchon ne rend pas les armes et repasse son adversaire dans le gauche après la ligne droite des stands. Magnifique attaque ! Cramer ne s’avoue pas vaincu et il reprend son bien au freinage en bout de ligne droite.
Alex finit « tranquillement » 5ième à 11 secondes. Quant à Cornut et Montessuit, ils terminent roue dans roue. C’est Billy qui prend le meilleur pour 90 centièmes mais, pris par l’intensité de la bataille, il se sort à l’entrée du virage de la ferme juste après la ligne d'arrivée !
C’est fait. Alex a remporté le titre. Je saute sur mon vélo pour assister à son retour. Il arrive. L’émotion est immense. Les rires fusent, les yeux sont humides. Beau geste sportif, Nicolas Souchon vient féliciter Alex et lui donner l’accolade. Et mince, je me mets à pleurer ! Les larmes du bonheur.
Alex rejoint le box. Il y a du monde, des cris de joie, des rires. Il ouvre la bouteille de champagne et arrose l’assistance. Benji le rejoint. Les deux champions sont acclamés.
Je vais m’asseoir. Je n’ai plus d’énergie. Je suis sur mon nuage, je regarde tout le monde autour de moi. Je suis heureux.
Quatre années à suivre Alex, ses débuts en 600, les premiers pas parfois difficiles, puis une deuxième année prometteuse avec une 3ième place à la clef, une saison de rêve l’an dernier avec le titre en 600 ; enfin 2017 qui devait être une année d’apprentissage.
En fait, Alex a décidé qu’il ne lui fallait que deux courses pour comprendre le fonctionnement de sa Suzuki. Et il n’a plus quitté le haut du tableau jusqu’à aujourd’hui.
Une année exceptionnelle au cours de laquelle il m’aura fait vibrer comme jamais. Avec en plus l’équipe Cottard où la passion se mêle au professionnalisme sans oublier la chaleur humaine.
Oui, vraiment, je suis aux anges.
Le paddock se vide doucement. Les camions sont chargés. Dom et Bruno reviennent avec les caisses dans lesquelles se trouve le moteur en pièces détachées après un démontage en règle et un contrôle par les techniciens de la FFM.
Près de l’auvent, la famille Vaucher a aligné les coupes remportées par Benji cette année, onze si j’ai bien compté. Clic.Une photo souvenir.
J’ai partagé avec cette sympathique famille de grands moments. Comme dit très justement Pierre, le papa de Baptiste et Benjamin, la course, c’est une succession de moments extraordinaires où l’on tutoie le bonheur et d’autres où l’on a envie de tout laisser tomber quand tout va mal. Cette année, ce ne fut que la première option qui fut retenue par la famille Vaucher. Je suis heureux de partager ce moment de bonheur avec eux.
Enfin, comme dans tout bon film, le scénariste avait ajouté une scène pour capter l’attention du spectateur.
Comment pourrais-je la décrire ? Vous mettez deux chaises au milieu du paddock vidé de ses occupants du week-end. Vous faites asseoir les deux pères des champions.
Vous leur rappelez leur pari lancé un soir, sur le circuit de Pau après un apéritif très bien arrosé. « Si nos deux gamins sont titrés en fin de saison, on se tond les cheveux ».
Je vous rassure, le spectacle fut à la hauteur avec, aux manettes, Benji et Alex. Un grand moment pour conclure une année exceptionnelle.