27 Chapitre
Tour de France side car
Comment m'est venu
de faire le
Tour de France side car (T D F SC)
De 1980 à 1988 il y eu une course sur route, qui se nommait
tour de France side car et qui avait comme règlement, le même que celui des rallyes routier FFM.
Ce dernier se courait sur route ouverte et comportait aussi quelques spéciales sur circuits et courses
de côtes.
Comme je le raconte dans le chapitre 24, sur (Oldies] Joël ENNDEWELL où le side car avant tout), je fus pilote d’essais pour HONDA
France : mon rôle était
de tester des motos qui commercialement et surtout techniquement seraient aptes à recevoir un side car.
Après les séances d’essais à Montlhéry, on passa à plus sérieux, et HONDA me demanda
de faire des essais sur route ouverte, ainsi que YAMAHA qui me confia du matériel pour faire
de même !
Après notre périple
de fous
de 4400 km en 3 jours et 4 heures raconté (Pages 23) sur :
http://www.pit-lane.biz/t5780p440-oldies-joel-enndewell-ou-le-side-car-avant-tout-la-suite ,
cela me donna l’idée d’organiser une course sur route façon rallye ? Et surtout !! Rien que pour les side cars.
Pour une aventure!, cela fût une aventure !!
En termes
de faisabilité !, notre base
de repère était d’avoir fait l’hexagone en 3j et 4 heures, avec deux side cars et, bien sûr, 4 pilotes.
Certes, les pilotes
de cette balade étaient des types très aguerris, mais on s’est dit ! Ça doit sans problème être faisable en une semaine, par n’importe quels sidecaristes un peu endurants, et surtout bien organisés ; à ce sujet j’avais d’ailleurs pensé que les équipages se relaieraient au guidon, ce qui ne fut pas du tout le cas pour pas mal
de concurrents.
Comme on n’avait pas beaucoup d’argent pour organiser cette épreuve !, on décida
de ne faire que 3 étapes dans la semaine.
Ainsi on économisait trois couchages et trois repas (les sans cœurs que nous étions).
1980 on était encore dans une époque ou les gens acceptaient
de se faire mal !
En 2015 je ne pense pas que ce projet aurait été porteur.
Pour commencer il fallait un club organisateur affilié à la FFM.
Christian LACOSTE, que j’aidais en rallye était le Président du moto club MC 77 Brie-Comte-Robert !
Donc, tout bêtement, le départ du premier
tour de France side car est parti
de ‘’Brie-Comte-Robert’’
Très vite les taches se sont reparties
de la manière suivante :
Christian LACOSTE avec le MC 77 s’occupaient
de la structure administrative,
Et moi je me chargeais
de toute la partie sportive et logistique.
Une telle épreuve, dure pour les hommes et les machines, se devait d’avoir une image forte.
De suite, nous avions décidé que nous ne pouvions pas faire un rallye pareil sans notre ami Charles KRAJKA.
Charles venait d’avoir un grave accident
de side car sur le circuit du MANS, où son fils Frédéric (dit Fred), qui était son passager, y avait perdu la vie.
Au risque
de faire un flop ? C’est à l’hôpital que nous sommes allé voir Charles, et qu’avec Christian, nous lui avons proposé
de le mêler à notre aventure, autant dire que l’on en menait pas large tous les deux.
Avec Charles, nous étions, et sommes toujours, très proches ; à vrai dire connaissant bien le bonhomme, je n’étais pas inquiet sur sa réponse. Mais bon !!!!
Je me rappelle encore à peu près les mots que j’ai employés :
Charles on va faire un truc
de fou ! Une course sur route, un truc
de caribou le couillu !!
Mais on ne veut pas le faire sans toi, à vrai dire on aimerait que toi et FRED soyez mêlés à cette aventure. Et si tu es d’accord on l’appellerait le T D F SC trophée Frédéric KRAJKA.
(On savait que c’était très dur pour lui et Titi sa femme ! Et bien sûr, son frère Eric !! )
Et je continuais donc en lui disant que l’on aimerait qu’il s’occupe
de la partie contrôle technique, et surtout que le vainqueur serait récompensé par un trophée, nommé Frédéric KRAJKA.
J’ai vu ses yeux briller ! Un pour la perte
de son fils, et l’autre pour le nouveau projet à la con qu’on lui proposait, et dont le genre l’a toujours enthousiasmé.
L’ancêtre nous a immédiatement répondu que OUI ! Il serait des nôtres !
La passion du sport moto l’a donc heureusement emporté sur la douleur, et ce projet allait le motiver à remonter la pente, et surtout occuper son cerveau bien encombré par la disparition
de Fred.
N’étant pas du genre à prendre du temps, avec Christian, on attrapa une carte
de France, (vous savez la grande rouge éditée par des gens qui font des pneus) et on s’est dit : on va leur faire bouffer
de la borne
.
Ben oui, pendant qu’ils roulent : on a pas à les nourrir, ni à les héberger (j’en ai presque honte en écrivant ce chapitre ! j’ai dit : presque !!!)
Et oui, il fallait optimiser la caisse du club, qui était inexistante.
On s’était donc débrouillé pour se faire inviter gratuitement dans les villes étapes ; repas du soir, petit déjeuner et couchage.
En contre partie, Moto Journal nous avait donné des pages gratuites dédiées au
tour de France side car, et on pouvait ainsi promouvoir nos sponsors et annonceurs ; à cela, se rajoutaient les publications faites via des articles dans les journaux locaux. Nos partenaires étaient ainsi récompensés.
L’argent qui permettait
de faire tourner la boutique, venait des engagements des concurrents et assistances et aussi
de quelques rares annonceurs.
Cela nous permettait
de financer :
Les frais
de fonctionnement et la communication,
Le Repérage des étapes,
Le Repérage et étalonnage des spéciales (tout le reste des kilométrages étaient établis par rapport à la carte routière).
Pendant la semaine du TDF, cela payait bien entendu les frais
de route des commissaires responsables des contrôles horaires, et des officiels.
Grâce au camion
de Charles, on transportait, entre autre, du matériel
de bureau pour faire face à toutes modifications éventuelles du parcours, mais aussi pour établir les classements et les publier :
A l’époque, l’ordinateur portable n’existait pratiquement pas, tout se faisait à la machine à écrire.
Le même camion transportait le matériel des concurrents qui n’avaient pas d’assistance. Le mythique camion couleur bordeaux
de Charles était bourré à craquer.
On n’était pas riches, mais on s’était bien organisé pour faire tourner la boutique.
Pour ce qui est du rythme
de course, on décide donc
de jouer sur l’endurance et la régularité, le règlement rallye impose 60 km/heure
de moyenne, ça correspondait bien à ce que l’on voulait faire, car nous, lors
de notre périple non stop, nous avions fait du 57.46 km.
De nos jours, les non-initiés se diront : 60
de moyenne ? pfffft ! fastoche !!!
T’as raison mon pote!! On est en 1980! C’est il y a 35 ans ! Très peu
de 4 voies, pratiquement pas d’autoroute, beaucoup
de villages à traverser.
Bon, en contrepartie, pas
de radar, ou si peu !!
Quand il vous faut enquiller environ 1200 km en une seule fois, qu’il faut manger, se ravitailler en essence ! Souvent
de nuit quant tout est fermé!! (Pas beaucoup
de 24/24 à l’époque ????). Pointer à l’heure aux CH, et dans la spéciale du jour (à l’entrée comme à la sortie), pas se perdre (en 1980 pas
de GPS, tout est à la carte), je peux vous dire que tenir ce rythme à 60 km
de moyenne, sur une telle distance, n’est pas simple.
Christian et moi-même décidions donc, que pour la première étape, le
tour passerait par la Bretagne, et que Morlaix serait le premier contrôle horaire (CH), et ensuite on fait redescendre les concurrents vers BORDEAUX !! ouafffff environ 1200 km !! Une portée d’arquebuse !! Une petite étape
de mise en bouche, quoi ! (rire).
Nous avions installé quelques CH, mais dans l’ensemble, à ce premier T D F SC, ils étaient assez restreints (six ou sept
de mémoire).
Après l’étape
de BORDEAUX, Christian LACOSTE nous avait trouvé une étape à Gréolière les Neiges (06) où nous avons été accueillis gratuitement par la station
de Ski, qui était toute neuve et qui cherchait à se faire connaître.
Comment aller
de BORDEAUX à Gréolieres !!! Devine ? D‘abord plein sud direction les Pyrénées où là, il y a quelques cols qui vont les occuper ! Et au sortir des Pyrénées, direction Gréolières les Neiges en parcours libre, avec juste une limite horaire.
Pour éviter toutes tricheries, nous avions installé des CH en haut des cols ; je peux vous dire que ça a été une étape très dure, car il a plu sur pratiquement tout le parcours
de celle-ci.
À la sortie des Pyrénées, les gars étaient sur les rotules et on fait route vers Gréolières par la voie la plus directe, à cela dire ! L’autoroute !
J’entends encore les commentaires avant cette étape où les concurrents m’ont dit : booof fastoche c’est tout droit !!
Ce qu’ils n’avaient pas prévu, c’était qu’après tous ces cols franchis, et en plus ayant déjà 3 jours
de courses dans les pattes, sur une autoroute, bercé par le ronron du moteur, tu ne peux que t’endormir. On en a vu des équipages nazes et usés, dans les stations services.
Et pour finir (si on peut dire), la troisième et dernière étape, Gréolières (O6) / DUNKERQUE (59) ! Oui, le bled tout en haut
de la carte !
Bof, encore une babiole ! Un petit peu
de cols dans l’arrière pays cannois ! Un petit
tour par le Jura et le Doubs ! Une spéciale du côté
de Bourbonne les Bains (52) sur une route forestière (bien trash), en plus
de nuit !!! Où pas mal se sont perdus. On peut dire que cette année-là, le
tour s’est joué à cet endroit.
Après avoir franchi l’arrivée à DUNKERQUE, il fallait rallier Brie-Comte-Robert pour la remise des prix, avec une heure d’arrivée, qui,
de mémoire, était assez souple.
Là aussi, la route toute droite
de DUNKERQUE à Brie a été très longue pour tous.
A la grande surprise, c’est la machine la moins puissante qui a gagné.
Ce fut l’équipage Jean-Louis CUENOUD (dit Tonton) et Gérard PLANCHON (dit Gégé) qui a remporté pour la première fois le trophée Frédéric KRAJKA.
Gérard PLANCHON est très connu des sidecaristes, il a travaillé pratiquement toute sa carrière à la prévention routière, et surtout, animait, il n’y a encore pas longtemps, les stages INISIDE organisés par l’ASM ACO au MANS. http://www.iniside.fr/.
Gégé nous a raconté, je le cite : Nous avons gagné le
Tour avec une 500 Yamaha XS bicylindre, attelée avec un Précision modèle Espadon. Et le but que l’on s’était fixé, c’était
de jouer la régularité.
Sur leur frêle attelage, par rapport à certaines machines taillées pour la gagne, le talent, le métier, la patience et l’intelligence ont très bien fonctionné entre Gérard PLANCHON et Jean-Louis, dit TONTON.
Voila, ce que je peux dire après 35 ans, j’ai certainement oublié des bouts
de cette histoire, mais ce que nous n’avons pas oublié, c’est Fred !!
Tu vois, Fred ! Un jour, lors d’une arrivée d’un des TDF SC dans le théâtre antique d’ORANGE, et devant la camera pour témoin, j’ai dit : Fred on ne t’oubliera pas.
Et bien, tu vois, Fred ! Aujourd’hui je parle encore
de toi.
Il est à remercier tous les Bénévoles, mes Amis, ma Femme, Krajka, Lacoste, Néné, la Grande, Serge, le Ranky, Philippe, Jaques SARTEL (notre médecin) et tous ceux que j’ai oublié et qui ont œuvré, roulé, et peu dormi pour cette belle aventure.
Voila, vous savez maintenant comment une poignée
de baltringues organisaient vos balades sur les routes
de France de 1980 à 1988.
PS :
Je ne pouvais pas parler du
Tour de France sans évoquer le moment le plus dramatique que nous ayons vécu lors
de ces huit éditions.
Si, bien sûr, cela a été pénible, et même très pénible pour les familles, qu’ils sachent que, pour nous, il en a été
de même.
Pour le souvenir des concurrents accidenté, et pour la première fois, je tenais aujourd’hui à m’exprimer sur ce sujet.
A tous je dis ! OUI ! Je me souviens
de ce jour où on m'a appelé à la CB pour m’avertir
de l’accident (à cette époque pas encore
de téléphone portable).
Que nous avons braillé dans cette putain
de CB pour appeler notre médecin, afin
de savoir à quelle hauteur
de la course il se trouvait.
Que nous avons roulé à des vitesses peu recommandables, pour rejoindre les lieux et que malheureusement nous avons découvert qu’il y avait eu :
- un décès,
- un blessé très grave,
- un autre blessé un peut moins grave,
- Et fort heureusement un quatrième indemne.
Un accident n’est parfois pas forcement une erreur
de jugement
de l’un ou
de l’autre.
Ce jour là, ce fut un concours
de circonstances absurdes et dramatiques qui se produisit à une des étapes d’arrivée.
Lors
de l’accident (je n’étais pas sur place, mais on m’a raconté)
Cela c’est passé dans la ville d’arrivée !
D’un côté, un des concurrent, qui avaient déjà franchi la ligne, et avaient quitté le parc fermé.
D’un autre côté, un concurrent encouragé par la foule, qui a cru que la voie était libre, et qu’il pouvait franchir un stop sans encombre.
Et voilà comment, en quelques secondes, un drame peut se produire !
Qui doit-on blâmer !
Le pilote qui a quitté le Parc ? Le règlement était formel, un concurrent dès qu’il a franchi la ligne d’arrivée, doit se rendre au Parc fermé et ne plus le quitter.
Celui qui n’a pas marqué le STOP et qui s’est quand même engagé, croyant, car encouragé pas des dizaines
de personnes, que la voie était libre.
Comme on dit : malheureusement, ce n’est pas aujourd’hui que l’on refera le match?
Et j’en finis juste pour dire que ! Je ne supporte pas quand quelqu'un part ! Encore moins quand c'est un pilote ou un passager.
Je sais l’engagement et le don
de soi-même que l’on offre quand on court !
De plus sur route ouverte où la sécurité est bien moindre que sur un circuit.
Dans les années 1990, Jacques DELPEROUX est mort dans mes bras sur le circuit Carole, et je sais comment la douleur peut être insoutenable, et cela je tenais à vous le dire.
Quand je courais, je le faisais en âme et conscience.
Oui, je savais, les risques encourus par les pilotes et les passagers, sur une épreuve comme le TDF SC,
Oui la course a toujours fait payer un lourd tribut à ceux qui restent.
Oui, nous les pilotes, nous serons toujours des éternels gamins égoïstes !
Mais personne ne nous a poussé à le faire !
Alors pourquoi le faisons-nous ????
Pour le plaisir égoïste que nous apporte ce sport hors norme.
Salut les copains.